Facebook pourrait se voir infliger une amende de plusieurs millions d'euros par la Commission européenne, qui l'a accusé mardi de lui avoir fourni «des informations trompeuses» lors de son enquête en 2014 sur le rachat du service de messagerie WhatsApp.

Cette procédure n'aura «pas d'incidence» sur le feu vert accordé à l'opération, finalement conclue pour 22 milliards de dollars, a cependant précisé la Commission, qui a adressé une «communication des griefs» --sorte d'acte d'accusation dans le jargon européen-- à l'entreprise américaine.

Facebook a jusqu'au 31 janvier 2017 pour répondre aux «craintes» de Bruxelles.

Si celles-ci étaient confirmées, la Commission pourrait lui infliger une amende allant jusqu'à 1% de son chiffre d'affaires, qui s'élevait à 17,9 milliards de dollars en 2015.

«À ce stade, la Commission craint (...) que Facebook ait fourni, délibérément ou par négligence, des informations inexactes ou trompeuses», affirme l'exécutif européen, gardien de la concurrence dans l'UE, dans son communiqué.

Facebook avait assuré lors de l'enquête menée par Bruxelles en 2014 sur le rachat de WhatsApp «qu'elle ne serait pas en mesure d'associer automatiquement et de manière fiable les comptes d'utilisateur des deux sociétés», une information dont la Commission explique avoir «tenu compte» pour autoriser l'opération.

Mais en août 2016, l'entreprise californienne avait modifié la politique de confidentialité de WhatsApp, permettant aux données récoltées sur cette application d'être utilisées pour proposer une publicité ciblée sur les autres applications du groupe comme Facebook ou Instagram.

La Commission avait entamé dès le mois de septembre des discussions avec Facebook, qui avait cessé temporairement, en novembre, le partage d'informations avec WhatsApp en Europe.

Dans son communiqué, la Commission conclut mardi que «la possibilité technique d'associer automatiquement les identifiants d'utilisateur de Facebook aux identifiants d'utilisateurs de WhatsApp existait déjà en 2014».

Bruxelles estime «particulièrement important» de pouvoir «se fier à l'exactitude et à l'exhaustivité des renseignements fournis, indépendamment de la question de savoir s'ils ont une incidence sur le résultat de l'appréciation de l'affaire».

Un porte-parole du groupe américain a dit avoir «bon espoir qu'un examen complet des faits confirmera que Facebook a agi de bonne foi».

«Nous avons constamment fourni une information précise sur nos plans et nos capacités techniques», a-t-il ajouté.

Le partage de données avec WhatsApp avait valu à Facebook de nombreuses critiques en Europe, notamment du groupe G29, qui réunit les autorités nationales de protection de données des différents États membres de l'UE (dont la CNIL française).

Le rachat de WhatsApp avait aussi été contesté à l'époque par des groupes de défense de la vie privée, qui craignaient un mauvais usage des données personnelles des utilisateurs.

«La présente enquête n'a rien à voir (...) avec les questions connexes de protection de la vie privée, des données ou des consommateurs», a cependant insisté la Commission.

Facebook rejoint Apple, Google, Amazon et Microsoft parmi les géants américains de la technologie à être concernés par une enquête de Bruxelles.

Une communication des griefs est une étape formelle dans une enquête de concurrence, qui permet aux parties d'exercer leur droit à la défense.