Les jeux virtuels n'étaient encore récemment qu'une manière agréable pour les fans d'une discipline sportive de passer le temps en attendant le véritable évènement, mais ils sont devenus aujourd'hui une industrie se chiffrant en milliards de dollars.

Le géant de l'internet Yahoo! ne s'y trompe pas, puisqu'il vient d'annoncer qu'il allait lancer un concours de jeux virtuels doté de prix, offrant pour la première fois la possibilité de jouer de l'argent. Le concours aura lieu une fois par semaine sur un site dédié appelé «Yahoo Sports Daily Fantasy».

Lors d'une récente conférence sur le sujet à New York, les réseaux de télévision dédiés au sport comme ESPN ainsi que les fédérations comme la NBA étaient largement représentés, témoignant de leur intérêt pour ce nouveau monde virtuel.

Selon Yahoo!, ses visiteurs dépensent déjà 30 milliards de dollars par an sur les jeux virtuels hébergés sur son portail et le site entend bénéficier de cette manne.

Dans un jeu virtuel, le joueur crée sa propre équipe en sélectionnant des joueurs du monde réel que cela soit de basket, de football, de football américain, de baseball ou de la course automobile.

Son équipe affronte ensuite les autres dans les mêmes conditions que la «vraie» compétition.

Aujourd'hui, près de 52 millions d'Américains participent à ces championnats virtuels, selon la FSTA (Fantasy Sports Trade Association) et certains prix dépassent le million de dollars.

En moyenne, ces joueurs virtuels dépensent chacun 465 dollars par an pour satisfaire leur passion, alors que le montant n'était encore que de 95 dollars en 2012, selon l'institut de recherche Ipsos.

Il y a encore quelques années, quand on parlait de jeux sportifs virtuels, cela suscitait «une forme de mépris», rappelle le président de la FSTA Paul Charchian. «Mais maintenant nous sommes courtisés», souligne-t-il.

«Rotisserie Baseball»

Ces jeux virtuels sont apparus dans les années 1980 quand un petit groupe de professeurs d'université, férus de baseball, a lancé «Rotisserie Baseball». Leurs équipes virtuelles étaient jaugées face aux véritables disputant les championnats américains et classées en fonction de leurs résultats.

Mais l'explosion de l'internet et des appareils mobiles a dynamisé le genre ainsi que la décision en 2006 du Congrès américain de ne pas considérer les jeux sportifs virtuels comme des jeux d'argent et de hasard en ligne, interdits aux États-Unis.

La généralisation des appareils mobiles connectés à l'internet fait que les parties de jeu virtuelles se déroulent maintenant simultanément avec les réelles et les participants peuvent même recevoir des alertes si leurs adversaires marquent des points.

Les jeux virtuels reproduisent également les véritables saisons, mais permettent aussi aux joueurs de continuer à s'affronter lorsque celles-ci sont finies.

Deux entreprises dominent actuellement ce secteur: DraftKings et FanDuel, valorisées chacune à environ un milliard de dollars. Preuve que ces deux sociétés ont pignon sur rue, DraftKings a un accord exclusif aux États-Unis avec la ligue de baseball MLB et FanDuel avec la NBA.

Bonne classe d'âge

Autre attrait des jeux virtuels, ils semblent très populaires dans la classe d'âge la plus favorisée des annonceurs, les 18-34 ans, qui représenteraient la moitié de ces joueurs virtuels, avec en prime un niveau de revenus et d'éducation plus élevé que la moyenne.

La «vraie» industrie du sport, lorgne aussi sur eux, car ils ont tendance à regarder davantage de matches à la télévision. Les réseaux de télévision dédiés au sport peuvent ainsi leur vendre davantage d'abonnements et les ligues professionnelles vendre les droits plus chers en s'appuyant sur cet auditoire supplémentaire.

Mondes virtuel et réel finissent même par se rejoindre lorsque la nouvelle de la blessure d'un joueur «réel» vient influer sur les équipes virtuelles pour lesquelles il ne peut, dans certains cas, plus être retenu. RotoWire est un service d'informations qui s'est spécialisé dans la fourniture à ses abonnés d'informations sur les petits bobos des joueurs.

Bob Vorwald, producteur-exécutif chez WGN-TV à Chicago, incite ses présentateurs sportifs à faire une plus large place aux jeux virtuels: «Toutes les chaînes de télévision cherchent à rajeunir leur auditoire, mais c'est difficile d'y arriver», souligne-t-il.