«Clinique» pour ordinateurs piratés, téléassistance ou techniques de protection des échanges : afin d'échapper à la surveillance massive des États sur le web, les militants d'un internet libre veulent simplifier leurs outils et les rendre accessibles au plus grand nombre.

Les révélations des programmes de surveillance de la toile, aux États-Unis ou ailleurs, ont remis ces derniers temps le camouflage informatique à la mode, parfois assimilé à de la paranoïa par le passé.

«Notre but est de développer une plateforme qui puisse être utilisée par ma mère en un clic», explique à l'AFP Giovanni Pellerano, ingénieur italien et cofondateur de GlobaLeaks, plateforme sécurisée qui permet à des lanceurs d'alerte de transmettre des documents confidentiels à des rédactions.

Mi-février, quatre médias français et belges (Le Monde, Le Soir, La Libre Belgique et la RTBF) ont lancé le site «Sourcesure» (www.sourcesure.eu) à partir de la technologie de GlobaLeaks. En quelques clics, le document est envoyé «de façon anonyme et indétectable» sans avoir la moindre notion de cryptage.

D'autres utilisations de la plateforme GlobaLeaks doivent voir le jour prochainement, a indiqué Giovanni Pellerano sans vouloir donner plus de détails.

«Les outils d'anonymat et de sécurité existent depuis des années, un de nos buts est de les simplifier», résume James Vasile, l'organisateur du Circumvention Tech Festival, qui se tient jusqu'au 6 mars à Valence et réunit des journalistes, des experts en informatique et des hacktivistes, ces militants au fait des dernières technologies et partisans de l'internet libre.

Cet événement rassemble des experts issus du journalisme, des nouvelles technologies ou d'internet pour «lutter contre la censure et la surveillance» sur le web. «Nos adversaires ont tellement plus de moyens que nous. Nous réunir pour échanger est la seule façon de faire avancer les choses», poursuit celui qui est aussi le directeur de l'Open Internet Tools Project (OpenITP).

«Facilité d'utilisation»

Jeudi dans le cadre de cette manifestation, une clinique d'un genre particulier sera montée pour la journée. Les clients ne seront pas des humains mais des ordinateurs, infectés par des virus, des boîtes courriels piratées ou des sites internet victimes de «défiguration» (remplacement de la page d'accueil d'un site web, NDLR).

«Tous ceux qui rencontrent un problème de sécurité numérique peuvent venir nous voir. Notre objectif est d'apporter une forme de connaissance et non pas d'installer un outil et de laisser ensuite la personne se débrouiller. Il doit y avoir un suivi», juge Daniel Bedoya, ingénieur costaricien de 27 ans et membre d'Access.

En temps normal, cette organisation à but non lucratif propose une assistance technique gratuite aux activistes, aux journalistes et aux organisations des droits de l'Homme. Access, qui propose ce service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, dispose de trois centres d'aide, situés au Costa Rica, en Tunisie et aux Philippines.

«Cela nous donne une connaissance du contexte régional, politique et religieux dans chacune de ces régions», ajoute Daniel Bedoya. Un simple courriel suffit pour recevoir une réponse «dans l'heure», assure le membre de cette organisation créée en 2009, après l'élection présidentielle contestée en Iran. «Nous traitons une soixantaine de cas par mois».

Au côté d'autres organismes, Access a mis en place une «trousse de premiers soins numériques», disponible sur internet (accessible en anglais en tapant «Digital security first aid kit», NDLR).

Pour Sergio Araiza, de l'ONG mexicaine SocialTic, qui fait de la recherche et de la formation dans le domaine de la sécurité numérique, «la vieille garde a tendance à proposer des solutions qui ne sont pas en adéquation avec les besoins des utilisateurs. Souvent, le fossé est énorme!»

«Heureusement, de nouveaux outils comme Redphone, Jitsi, Tresorit ou Cryptocat ont été développés par des personnes passées par des entreprises comme Yahoo, Dropbox ou Apple. Grâce à leur expérience, ils y ont intégré la facilité d'utilisation», souligne-t-il.