Pour obtenir des bitcoins, qui constituent 95 % des monnaies virtuelles échangées dans le monde, un simple ordinateur suffit. Une fois téléchargé un logiciel gratuit, la fabrication de cette monnaie - le «minage» - peut débuter.

Le prospecteur de bitcoins rejoint alors un réseau réunissant des dizaines de milliers d'ordinateurs dans le monde.

Sa mission: résoudre des équations successives qui lui valent d'être récompensé en cas de succès par les bitcoins tout juste créés.

Grâce à un algorithme produisant à chaque fois un petit puzzle mathématique, un nombre précis de bitcoins est émis à un rythme d'environ toutes les dix minutes.

Actuellement, et ce depuis janvier 2013, chaque équation résolue aboutit à la création de 25 bitcoins, un nombre qui sera divisé par deux tous les quatre ans jusqu'à la fin prévue de la création de nouvelle monnaie aux alentours de 2140.

L'écart entre deux émissions de bitcoins correspond au temps pris pour résoudre le problème.

Mais le système s'adapte à la puissance de calcul des ordinateurs des «mineurs», en hausse continue, pour que ce délai ne soit pas raccourci exagérément.

Lorsque l'ordinateur d'un «mineur» trouve la solution, celle-ci est immédiatement vérifiée par les autres utilisateurs.

«C'est un peu comme rentrer une combinaison de chiffres dans un digicode. Une fois que vous avez réussi à ouvrir la porte, vous envoyez le code à d'autres personnes qui s'assurent à leur tour qu'il est bon», explique Thomas France, cofondateur de la Maison du Bitcoin, dont les locaux sont situés dans le quartier parisien du Sentier.

Le «mineur» obtient ainsi le droit de valider le bloc des transactions ayant eu lieu dans ce laps de temps, et, en récompense, se voit attribuer tous les bitcoins émis de même que les frais de transactions.

Ceux-ci doivent à terme prendre le relais de la création de bitcoins, vouée à diminuer, en tant que carotte pour maintenir la puissance de calcul nécessaire à la certification.

Concrètement, posséder des bitcoins, c'est connaître une suite de chiffres et de lettres, entre 27 et 34, qui constituent une adresse, et pas à proprement parler un compte. Il faut garder sous une forme écrite ou digitale cette suite de caractères sous peine de perdre ses bitcoins.

Chacune de ces adresses comporte une clef publique qu'on peut laisser circuler et une clef privée qui elle doit rester secrète sous peine que quelqu'un d'autre dépense vos bitcoins.

«Ces informations sont généralement stockées dans une application qui permet une utilisation simple et rapide de ses bitcoins», précise Thomas France.

Ce système de cryptage garantit la sécurité des transactions. En même temps, le système est transparent, car n'importe quel autre utilisateur peut consulter le montant de bitcoins affecté à chaque adresse avec la clé publique, et en retracer le parcours depuis leur création.

«Bitcoin, c'est un protocole qui permet de résoudre un problème majeur qu'on a sur internet, c'est-à-dire comment créer de la confiance entre deux personnes qui ne se connaissent pas», ajoute M. France.

Le «minage» de bitcoin échappe de plus en plus aux particuliers

PARIS - Alors que le krach-éclair du cours du bitcoin observé lundi sur une plateforme d'échange pose à nouveau la question de son devenir, le «minage» de cette devise virtuelle s'intensifie sur fond de professionnalisation du secteur.

Les géniteurs de Bitcoin, dont la mort a été annoncée au moins une demi-douzaine de fois, ont certes la satisfaction d'observer la résilience de son développement.

Mais ils n'avaient peut-être pas prévu la concurrence acharnée qui régnerait cinq ans et demi après son lancement entre les dizaines de milliers d'utilisateurs dans le domaine de l'extraction.

Raisonnable lors des premiers mois d'existence du système, la probabilité pour un individu seul de «miner» des bitcoins avec un PC standard est en effet aujourd'hui proche de zéro, le coût en électricité étant de toute façon prohibitif.

Face à cette compétition accrue, des coopératives de «mineurs» avaient déjà vu le jour afin d'assurer des gains plus modestes mais réguliers, calculés au prorata de la puissance de calcul apportée par chaque utilisateur.

L'extraction demeure un business rentable: sur la seule journée de mercredi, l'argent distribué à ceux ayant résolu une équation s'est élevé à un peu plus de 1,7 million d'euros au cours actuel.

Cependant, du fait du besoin en calcul nécessaire, elle semble désormais irrémédiablement réservée à des spécialistes dotés de moyens financiers élevés.

Cette évolution a de quoi décourager ceux pour qui l'émergence du Bitcoin et la pratique du «minage» en parallèle de la hausse du cours avaient fait miroiter l'espoir de gains importants.

Certains particuliers ont développé une forme de dépendance et se sont installé des parcs individuels de plus en plus performants, en y rajoutant au fur et à mesure des unités de calcul et des cartes graphiques.

Un centre de «minage» amateur peut être installé dans une cave, comme celui opéré un temps par Mickaël dans son appartement des Lilas, en région parisienne.

«J'ai acheté pour environ 23 000 euros (plus de 33 000 $) d'équipement en un an et demi. J'ai réussi au début à recouvrer quasiment la moitié de ma mise mais je ne gagne plus rien depuis mai 2013», révèle-t-il.

Car la course à l'armement a pris une ampleur inédite avec l'apparition des fermes de «minage» réunissant dans de vastes hangars des centaines d'ordinateurs, propriétés d'entreprises et d'investisseurs.

Beaucoup sont situées dans les pays nordiques pour éviter d'avoir à gérer les problèmes de refroidissement, qui rendaient la vie très inconfortable à Mickaël en été.

Si les plus grosses ingurgitent assez de courant pour répondre aux besoins d'une ville de 8000 habitants, cela leur permet d'obtenir environ un neuvième des bitcoins émis, soit chaque mois entre 5 et 9 millions d'euros suivant le cours.

Puces 

Outre la facture de courant, il faut acquérir des puces particulières qui se consacrent uniquement au «minage».

Mickaël en a acheté trois, à 1400 dollars pièce, mais débordé par la demande le fabricant a connu des retards de livraison, et quand elles sont enfin arrivées, l'obsolescence avait déjà largement diminué leur puissance sur le réseau.

«La difficulté a tellement explosé, que je me demande si le bitcoin n'est pas devenu bien plus juteux pour les équipementiers informatiques que pour tous les extracteurs», déplore-t-il.

Le matériel s'avérant hors de prix, des contrats de «minage» permettant désormais de louer directement de la puissance de calcul ont aussi vu le jour, en dépit d'une rentabilité bien éloignée des temps glorieux.

«Si les pionniers ont pu se remplir les poches, la marge de l'extraction va tendre vers zéro», prévient Nicolas Kornman, ancien courtier chez SocGen.

En marge de cette activité, une spéculation traditionnelle sur le cours existe, dont les soubresauts sont très visibles en raison d'une volatilité vingt fois supérieure à celle du dollar.

«Détenir un bitcoin pendant 5 jours c'est comme détenir un dollar pendant un an: il y a une incertitude immense par manque de repères et en raison de l'attitude différente de chaque État», résume-t-il.

Alors qu'un bitcoin valait moins d'un dollar jusqu'en 2011, son cours a atteint presque 1200 dollars à l'automne 2013, avant de retomber à environ 400 dollars en août.

«Ces fluctuations, qui découlent d'une liquidité très faible, ne sont pas le fruit d'une manipulation des cours, et les plateformes d'échange recrutent maintenant du personnel qualifié», assure Thomas France, de la Maison du Bitcoin, un espace dédié à la monnaie virtuelle.

Toutefois, devant le risque élevé, les néophytes devraient utiliser le bitcoin seulement comme moyen de paiement.