Le bitcoin «n'est pas une monnaie» et les gains afférents sont a priori imposables, estime le gouvernement japonais saisissant pour s'exprimer l'aubaine que constitue la faillite de la plate-forme d'échange MtGox sise au Japon.

Les autorités nippones n'accordent au bitcoin que le statut de «marchandise» ou «chose».

Cet avatar de monnaie ne peut en outre être pris en charge par les banques commerciales, précise aussi la déclaration gouvernementale préparée en réponse à une question d'un parlementaire de l'opposition. Cet avis n'est pas une réglementation, mais il pourrait le devenir.

L'évolution de la position du gouvernement japonais face au bitcoin, qui existe depuis 2009, découle de la faillite récente d'une des plates-formes d'échange, MtGox, installée à Tokyo.

Cette dernière a stoppé soudainement au début du mois de février les retraits en devises effectués à partir de bitcoins ainsi que toutes les transactions quelques jours plus tard.

Selon le patron de MtGox, le Français Mark Karpelès, cette décision suivie d'un dépôt de bilan était la seule possible après la découverte «de points faibles du système» qui ont entraîné la disparition de quelque 750 000 bitcoins de clients et 100 000 détenus par la société. Pas moins de 127 000 utilisateurs, dont 1000 Japonais, sont de facto lésés.

MtGox aurait été victime d'un piratage informatique, comme l'a d'ailleurs aussi été ensuite la société Flexcoin, enregistrée au Canada, également contrainte de cesser ses activités. De plus, la dirigeante de la bourse singapourienne d'échange de bitcoins First Meta a été retrouvée morte fin février pour une cause encore inexpliquée.

Dans ce contexte un rien funeste, le ministre japonais des Finances, Taro Aso, ne cesse de descendre en flamme le bitcoin qu'il ne porte manifestement pas dans son coeur.

Le gouvernement, qui semblait ronger son frein, a donc désormais une bonne raison de s'attaquer à la «chose» dont ne veut d'ailleurs pas entendre parler l'Agence des services financiers (FSA).

Songer à imposer les bitcoins, c'est «naturel»

«Il est naturel» que le ministère des Finances s'interroge sur la possibilité d'imposer les transactions en bitcoins qui rapportent des gains, a commenté vendredi le secrétaire général du gouvernement nippon, Yoshihide Suga.

Sur la base de l'avis émis vendredi, le gouvernement va désormais étudier les mesures possibles dans le cadre législatif actuel avant éventuellement d'aller plus loin, a précisé M. Suga.

Selon les médias, l'Agence des impôts tend en effet à considérer que la taxe sur la consommation (équivalent de la TVA française) doit être payée pour des achats réglés en bitcoins et que les impôts sur les sociétés doivent être acquittés pour les firmes qui en profitent, de même que devraient être taxés les bénéfices que des particuliers tirent d'investissements en bitcoins.

Les autorités financières nippones jugent aussi que les bitcoins, qui échappent aux États et banques centrales, doivent faire l'objet de règles internationales puisqu'ils s'échangent au-delà des frontières. Cela devra être discuté une fois la «saga» MtGox clarifiée, selon M. Suga.

Bénéficiant de l'anonymat, ces bitcoins sont en outre vus comme des outils parfaits de blanchiment d'argent, ce contre quoi entend aussi sans doute lutter le gouvernement japonais.

Si les bitcoins étaient utilisés de la sorte, «ce serait un délit», a souligné M. Suga.

Si le Japon parvient à mettre en place des règles strictes pour les bitcoins, ce sera le premier exemple parmi les pays riches, soulignait le Nikkei en milieu de semaine.

Le Canada, l'Allemagne ou encore la Corée du Sud s'interrogeraient aussi sur un encadrement, tandis que d'autres pays plus coercitifs, comme la Russie et la Chine, ont déjà restreint l'usage des bitcoins.