Internet et la montée de géants comme Amazon n'en finissent pas de bousculer le secteur de la distribution aux États-Unis, où les magasins traditionnels doivent s'adapter au risque de sombrer dans de graves difficultés, à l'instar de JCPenney ou Best Buy.

Howard Schultz, le PDG de la chaîne de cafés Starbucks, l'affirmait il y a quelques jours: «les gens passent plus de temps que jamais en ligne, c'est une vague de fond qui change la donne pour les distributeurs».

«Les gens ont un mode de vie frénétique, ils sont tout le temps sur leur smartphone et font leurs courses 24h sur 24, sept jours sur sept», renchérit Virginia Morris, directrice de la stratégie de consommation pour le cabinet de conseil en marketing Daymon.

«Il n'y a pas de règle absolue dans la distribution, mais il faut trouver une niche pour apporter de la valeur ajoutée» face au raz-de-marée internet, note pour sa part Paul Swinand, analyste de la maison de recherche Morninstar.

Certains poids lourds du secteur comme les grands magasins Macy's, dont les ventes souffrent depuis 2007, ont investi très tôt dans leur site de vente en ligne.

En outre, Macy's a su se positionner sur le haut de gamme avec une offre pléthorique et des services de conseil pour que ses clients aient toujours plaisir à venir dans ses magasins.

À l'inverse, des chaînes de grands magasins comme JCPenney et Sears ont raté le tournant internet.

L'enseigne de grands magasins Sears a fait des progrès dans le cybercommerce, mais «n'investit plus assez dans ses magasins qui sont sales, trop peu approvisionnés et avec trop peu de vendeurs», constate M. Swinand.

Il rappelle que les problèmes des grands magasins JCPenney ont commencé lorsque la chaîne a embauché Ron Johnson, considéré comme un génie du secteur pour avoir orchestré le concept des Apple Store, au poste de directeur général.

Or M. Johnson a choisi pour JCPenney une stratégie devenue un cas d'école de ce qu'il ne faut pas faire. En pleine récession aux États-Unis, il a mis fin à la pratique historique des fortes promotions qui attiraient un public fidèle et a fait rénover les magasins d'une manière qui n'a pas su séduire les plus jeunes.

Le groupe est en phase de soins intensifs: il vient d'annoncer la fermeture de 33 magasins aux États-Unis et la suppression de 2000 emplois.

D'autres secteurs de la distribution sont particulièrement touchés par la concurrence du cybercommerce, notamment les biens culturels et l'électronique.

La chaîne de librairies Borders a ainsi été terrassée par Amazon et a fait faillite il y a deux ans, tandis que sa concurrente Barnes & Noble tente de se réinventer.

Elle développe les offres annexes pour faire de ses magasins une destination familiale: partenariat avec Starbucks ou des papetiers, vente de jouets, organisation de lectures ou dédicaces, de goûters d'anniversaire, etc. Elle développe aussi ses propres liseuses électroniques pour se faire une place sur le marché des e-books.

L'enseigne de produits électroniques Best Buy souffre, elle, du «show-rooming»: les acheteurs ne visitent les magasins que pour comparer les produits et demander conseil, puis, leur choix fait, partent à la chasse au meilleur prix sur internet.

«Avec Amazon qui ne facture pas toujours de taxes, c'est une bataille difficile à gagner», remarque M. Swinand.

Best Buy a ainsi vu son action plonger de 30% après avoir annoncé mi-janvier des ventes de Noël décevantes.

Pour Virginia Morris, Best Buy va devoir trouver «des recettes alternatives», comme le conseil aux seniors, qui «ont des revenus et besoin d'aide en informatique».

L'habillement aussi subit durement la concurrence de l'internet.

Certaines solderies ont déposé le bilan comme Filene's Basement ou Loehmann, mais pour Virginia Morris, il s'agit plus d'erreurs de stratégie que de la disparition de pans entiers de la distribution.

«Je ne pense pas que les solderies traditionnelles vont disparaître, il y a encore des gens qui aiment cette chasse au trésor au milieu de montagnes de vêtements», remarque-t-elle.