Le piratage sur internet se modernise, avec trois pratiques qui montent: le streaming (consultation en ligne) sur téléphone intelligent, le ripping (téléchargement définitif des oeuvres en streaming) et les VPN, sorte de «couloirs» privés sur le web, indique une nouvelle étude de l'autorité anti-piratage française.

Celle-ci, l'Hadopi, a mené une enquête, parue vendredi, auprès de 1434 internautes, dont 531 qui déclarent consommer illégalement films, séries TV ou musiques, que ce soit en streaming ou par échange de fichiers entre internautes, technique dite de peer-to-peer (P2P).

Outre un constat sans surprise de la banalisation des pratiques illicites, jugées faciles par les trois quarts des internautes, l'Hadopi constate une montée du streaming sur téléphones portables, avec des applications comme streaming4iphone, qui donnent accès gratuitement à des milliers de films, séries et musiques.

Cette tendance s'inscrit dans la vogue générale de la consultation des oeuvres gratuitement en streaming, proposées par des milliers de sites. Les fichiers sont envoyés par des internautes sur un serveur situé quelque part dans le monde et ensuite rendus disponibles pour tous en streaming, via des sites qui se contentent d'afficher des liens vers ces serveurs.

Parallèlement à la montée du streaming se développe massivement le ripping: l'enregistrement sur son appareil d'une oeuvre que l'on consulte en streaming. Quelque 41 % des consommateurs de musiques, films ou séries ont déjà utilisé des logiciels de ripping, que l'on trouve partout, et ce taux monte à 57 % chez les consommateurs illégaux.

Ces logiciels, y compris sur téléphone intelligent, sont très utilisés par les jeunes pour enregistrer des morceaux sur YouTube, par exemple.

Menace pour Deezer ou Spotify

Enregistrer l'oeuvre permet non seulement de l'écouter hors connexion, mais aussi de la partager avec d'autres, ce qui est à la source du piratage. L'Hadopi constate avec inquiétude que les internautes qui consomment illégalement font souvent la démarche de partager des oeuvres avec d'autres: 46 % d'entre eux ont déjà partagé leurs fichiers, par échange direct entre internautes ou envoi sur un serveur.

Les sites de peer-to-peer encouragent d'ailleurs le partage, en déclenchant automatiquement l'échange de vos fichiers avec tous les membres inscrits dès que votre ordinateur est allumé. C'est même souvent la condition pour pouvoir continuer à se servir du site. Quand aux sites de streaming, souvent payants ou vivant de publicité, certains rémunèrent les internautes qui leur envoient des fichiers. Mais souvent ces derniers le font par militantisme, pour le principe de gratuité.

Le ripping fait planer une menace non seulement sur les sites de musique payants, comme Deezer ou Spotify, mais même maintenant sur les sites gratuits vivant de publicité, comme les sites de télévision de rattrapage. Ainsi le site captvty, qui centralise des émissions de télévision rattrapage des chaînes, et permet de télécharger ces émissions et de les regarder sans publicité, a été attaqué en justice cet été par TF1, a rapporté le site d'actualité sur l'informatique Clubic.

Dernière pratique à la mode, les VPN, ces «couloirs» privés sur internet qui permettent de surfer anonymement ou en faisant croire qu'on se connecte depuis un autre pays, pour éviter les blocages de sites au niveau national.

Néanmoins, un tiers des consommateurs illégaux dit aller sur des sites illicites uniquement après avoir échoué à trouver les oeuvres qu'ils cherchaient sur des sites autorisés. S'ils ne les trouvent pas, c'est le plus souvent en raison de la chronologie des médias en France, qui interdit de vendre un film juste après sa sortie en salle par exemple, alors que les deux tiers des consommateurs cherchent des oeuvres de moins de 6 mois.

Et à l'avenir, 68 % des internautes sont convaincus que l'offre légale va se développer, entraînant avec elle une consommation licite plus importante.