La Commission européenne s'achemine vers une solution amiable dans le dossier Google et espère clore «au printemps» l'enquête qu'elle a ouverte il y a près de trois ans contre le géant d'internet, accusé de pratiques anticoncurrentielles.

«En matière de recherche et de publicité en ligne, les Européens veulent une concurrence non biaisée et du choix», a rappelé mardi le commissaire européen à la Concurrence, Joaquin Almunia, invité à s'exprimer sur le cas de Google au Parlement européen.

«Ils le veulent tout de suite, et méritent de l'obtenir tout de suite si possible, et non pas après des années de procédure», a-t-il poursuivi, manifestant, comme il l'a déjà fait par le passé, sa préférence pour une solution négociée.

Au printemps dernier, le géant d'internet, soupçonné de biaiser la concurrence sur les marchés de la recherche et de la publicité en ligne, avait proposé des remèdes à la Commission, qui les a soumis au jugement des plaignants, parmi lesquels Microsoft, et de ses concurrents.

L'exécutif européen espérait alors pouvoir clore le dossier après l'été. Mais ces remèdes n'ont pas été jugés suffisants et M. Almunia a demandé au patron de Google, Eric Schmidt, de revoir sa copie.

Le groupe californien a alors proposé de nouveaux engagements, qui constituent «une amélioration substantielle», a jugé M. Almunia mardi, ouvrant clairement la porte à un accord.

L'organisation FairSearch, qui regroupe une partie des plaignants, a souhaité mardi que la Commission teste ces nouvelles propositions sur le marché, «seule manière de vérifier l'efficacité des remèdes proposés pour rétablir la concurrence». Mais M. Almunia n'a parlé pour l'instant que de soumettre un questionnaire aux adversaires et concurrents de Google.

«Si notre enquête sur ces propositions améliorées est satisfaisante, je continuerai sur la voie» d'une solution négociée, en rendant les engagements de Google légalement contraignants, a expliqué le commissaire européen. Dans ce cas, il souhaite «arriver à une solution au printemps prochain», soit avant la fin du mandat de la Commission actuelle.

Enquête «très longue et minutieuse»

Dans le cas contraire, la Commission «enverra une communication des griefs à Google dans les prochains mois», ce qui pourrait se traduire au terme du processus par une amende atteignant au maximum 10% du chiffre d'affaires annuel de l'entreprise.

Mais «je pense que la voie d'un accord amiable reste le meilleur choix», a insisté M. Almunia.

Un responsable de Google, Kent Walker, a réagi dans un communiqué en rappelant que l'enquête de la Commission avait été «très longue et très minutieuse». «Dans un contexte de très vive concurrence en ligne, nous avons pris la décision difficile d'accéder à ses exigences dans le but de parvenir à un accord», a-t-il ajouté.

Google est en particulier accusé de mettre en avant ses propres services au détriment des autres moteurs de recherche spécialisés, par exemple dans les restaurants ou la géolocalisation.

Ses nouvelles propositions rendraient les liens vers ces sites concurrents «nettement plus visibles» et plus d'espace leur serait consacré sur les pages Google, avec la possibilité de présenter leur logo et des informations sur leur contenu, a expliqué M. Almunia.

Les nouveaux engagements de Google vont aussi plus loin pour mettre fin à des exigences jugées abusives par les éditeurs et les publicitaires en ligne.

L'enquête visant Google a été ouverte il y aura bientôt trois ans, en novembre 2010, à la suite de plusieurs plaintes, dont une émanait du portail internet Ciao appartenant à Microsoft, qui s'est lui-même joint à la plainte en 2011.

Google, qui contrôle environ 70% de la recherche en ligne aux États-Unis et plus de 90% dans l'Espace économique européen, avait été blanchi début janvier par la justice américaine dans un dossier d'entrave à la concurrence très similaire à celui instruit par la Commission européenne, moyennant des engagements de bonne conduite.

M. Almunia a rappelé que cette enquête n'était pas la seule de la Commission visant Google, puisqu'une autre est en cours à propos des brevets détenus par sa filiale Motorola Mobility.

La Commission n'a par ailleurs pas encore décidé si elle ouvrirait une enquête formelle contre Google concernant certains aspects de son système d'exploitation Android. Le groupe américain est aussi dans le collimateur de plusieurs régulateurs nationaux qui lui reprochent de ne pas respecter la confidentialité des données.

Mais cette affaire est la plus emblématique parmi tous les cas de concurrence traités par la Commission européenne, et «l'opinion publique comme les parties prenantes lui accordent plus d'attention qu'à n'importe quelle autre», a souligné mardi M. Almunia.