Facebook tente de rassurer ses usagers en jouant la carte de la transparence. L'Agence nationale de sécurité américaine (NSA) est accusée depuis quelques jours d'espionner les communications des sites en ligne comme Facebook, Google et Skype. Facebook a riposté en révélant hier le détail des pays qui ont demandé des informations sur ses utilisateurs et dont la palme revient aux États-Unis. Pour comprendre ce nouveau scandale lié aux révélations de l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden, voici quatre mots-clés.

> Transparence

De janvier à juin 2013, Facebook a reçu plus de 25 000 demandes de données de 74 pays, dont la moitié provenaient des États-Unis, selon le rapport du réseau social publié hier. Des informations ont été fournies pour 79% des demandes américaines. Certaines étaient de nature «criminelle ou relevant de la sécurité nationale», a indiqué Facebook, sans donner plus de précisions. «La transparence et la confiance sont des valeurs fondamentales chez Facebook», a affirmé l'avocat général du groupe, Colin Stretch. Des groupes comme Google, Microsoft et Twitter ont aussi publié des rapports de transparence dans un effort similaire pour restaurer la confiance des usagers.

> Espionnage

Facebook n'aborde dans son rapport que les demandes formulées. Il y a effectivement le cas de figure où le réseau reçoit une demande assortie d'un mandat de perquisition et accepte de fournir des données concernant un individu. «Il y a le deuxième volet, que l'on découvre maintenant et qui est que Facebook a donné un accès plus large [...] à la NSA», explique Benoît Dupont, titulaire de la Chaire de recherche du Canada en sécurité et technologie à l'Université de Montréal. La NSA n'aurait même plus à formuler des demandes, selon les récentes révélations de Snowden. «Ce qu'on pense qui se passe, c'est que la NSA dédouble le trafic entrant et sortant de Facebook, Yahoo!, Google, etc.», ajoute l'expert.

> Tradition

La collaboration des entreprises de communication avec le gouvernement américain ne date pas d'hier. La NSA et les agences précédentes ont collaboré avec les compagnies téléphoniques et même avec celles de télégraphe, précise M. Dupont. «Facebook, qui est la dernière incarnation de cette industrie privée des télécommunications, perpétue une tradition de collaboration», dit-il. Les réseaux sociaux ont, tout au plus, permis une plus grande banalisation de la surveillance. «Sur Facebook, on est dans un rapport d'amitié et on écrit ce qu'on fait, ce qu'on pense, en se disant que ce n'est pas de la surveillance!», souligne André Mondoux, sociologue et professeur à École des médias de l'UQAM.

> Suspect

Selon M. Mondoux, qui est aussi membre du Groupe de recherche sur l'information et la surveillance au quotidien, on se rassure en pensant que l'on n'a rien à cacher ou à se reprocher. «Mais la collecte d'une vaste quantité d'informations permet de produire des corrélations algorithmiques et de projeter des comportements», souligne-t-il. La porte est donc ouverte à l'interprétation et aux erreurs sur la personne. «C'est présumer que le système ne se trompera jamais ou que vous ne serez pas piraté, poursuit M. Dupont. Ce n'est pas Big Brother la menace, mais plutôt Kafka. Comme dans le livre Le Procès [de Franz Kafka], vous ne savez pas pourquoi vous êtes accusé, tout ça parce qu'un jour, un algorithme vous a désigné comme suspect.»

- Avec l'Agence France Presse