À ne pas confondre avec l'internet, mis sur pied plusieurs années plus tôt, le World Wide Web est «né» le 30 avril 1993. Ce jour-là, le centre de recherche CERN, en Suisse, où oeuvrait l'inventeur Tim Berners-Lee, a rendu public le premier logiciel permettant de faire tourner un serveur web.

Du coup, il devenait possible pour le public à la fois d'avoir accès à des documents et de les partager, surtout sous forme de texte.

Le tout premier site web, celui du CERN, était consacré au web lui-même. Il décrivait notamment la technologie, comment s'en servir et comment configurer un serveur.

Vingt ans plus tard, les usages du Web se sont multipliés, et la technologie est évidemment devenue incontournable.

La Presse a demandé à trois personnages influents du développement du web canadien et québécois aux horizons différents de partager leur vision du web des prochaines années.

Yves Williams, président d'Agentsolo.com

M. Williams a cofondé la Toile du Québec deux ans après la création du Web. On y répertoriait les rares sites québécois de l'époque. Son entreprise, Netgraphe, est devenue quelques années plus tard la première «dotcom» boursière québécoise.

Sociologue de formation, il tend naturellement à observer les progrès et les tendances du web avec cette loupe. «Ce qui a surtout changé depuis 20 ans, c'est ce qui est le plus proche de nous, comme la relation que l'on a avec nos amis, notre famille, nos collègues ou encore avec l'argent, que l'on peut gérer en ligne.»

Certaines structures plus lourdes, notamment les gouvernements et les universités, n'ont pas évolué aussi rapidement, note-t-il. Les gouvernements, d'abord, ne profitent pas encore assez de ce support pour faire preuve de transparence, selon lui.

«On voit comment les paradis fiscaux commencent à être mis à mal parce que le web facilite les fuites d'information. Il faut faire un pas vers la transparence.»

Quant aux universités, le web pourrait jouer un rôle centralisateur. «Je ne serais pas étonné si, d'ici quelques années, plus de la moitié des étudiants étaient diplômés des grandes universités comme Harvard, auxquelles l'accès pourrait être facilité par le web.»

Alexandre Taillefer, associé principal, XPND Capital

Cet entrepreneur a fait fortune très jeune en vendant Intellia, une entreprise née dans les premiers mois d'existence du web.

Les prochaines grandes tendances du web, selon lui: les communications machine à machine, l'analytique et l'intelligence artificielle.

«Tout va être connecté, de nos plantes à nos réfrigérateurs en passant par nos grille-pain. On parle déjà beaucoup du big data, mais ça va être encore beaucoup plus gros. C'est débile, ce qui s'en vient en termes de taille des bases de données et d'analytique pour faire des corrélations auxquelles on n'aurait pas pensé.»

L'exemple des plantes peut paraître simplet, convient-il, mais «il illustre bien ce que je vois, ça va aller très, très loin. Il y a beaucoup de choses où l'intervention humaine sera éliminée».

Byron Holland, président de l'Autorité canadienne pour les enregistrements Internet (ACEI)

M. Holland dirige l'organisme chargé de la gestion du domaine «.ca», qui identifie les sites internet canadiens. Sa perspective sur le Web est très internationale.

«Il a fallu 20 ans pour attirer 2 milliards d'utilisateurs, surtout occidentaux. Les deux prochains milliards vont aller beaucoup plus vite, peut-être cinq ans. Ils vont emmener différentes langues, différents caractères - pensons aux caractères arabes -, différentes façons de faire des affaires.»

Ces milliards de nouveaux utilisateurs, fait-il aussi remarquer, se serviront pour la plupart d'appareils mobiles, plutôt que d'ordinateurs, pour accéder au web.

Un autre changement important devrait être bientôt visible. Le domaine «.com», de loin le plus connu du web, devrait avoir avant la fin de l'année de nombreux nouveaux compétiteurs. «Quiconque aura un modèle d'affaires qui se tient pourra créer des adresses comme .hockey, .montreal ou .quebec, dit-t-il. Je ne sais pas quel genre d'impact ça aura, mais ça en aura un.»

Le web en chiffres

2 700 000 000


Nombre d'utilisateurs de l'internet dans le monde

39 %

Part de la population mondiale qui utilise l'internet

75 %

Taux de pénétration de l'internet en Europe (le plus élevé)

16 %

Taux de pénétration de l'internet en Afrique (le plus faible)

61 %

Taux de pénétration de l'internet en Amérique

Source : Union internationale des communications