Aux quatre coins du monde, l'Église catholique embrasse dorénavant Twitter et les réseaux sociaux. L'archevêque de Québec et un nouvel évêque auxiliaire de Montréal sont au premier rang de cette révolution. Portrait d'une révolution numérique au sein du clergé.

La nomination d'un évêque auxiliaire à Montréal est un événement que les médias, depuis le temps du cardinal Léger, ignorent généralement. Pourtant, l'automne dernier, ils ont fait grand cas de celle de Thomas Dowd. Il faut dire qu'il avait la réputation d'être un «prêtre blogueur». Il possède même, depuis 2009, un compte Twitter.

Le cas de Mgr Dowd est loin d'être unique. L'archevêque de Québec, Gérald Cyprien Lacroix, a son compte Twitter, distinct de celui du diocèse de Québec. L'archevêque de Montréal a pour sa part couvert en direct sur son compte Twitter les interventions des participants au colloque sur le catéchuménat d'octobre dernier.

La tendance est mondiale. Le directeur de la prestigieuse revue jésuite romaine Civiltà cattolica se surnomme lui-même «cyberthéologien» et soutient que Pie XI avait dans les années 30 eu l'intuition des réseaux sociaux - parce qu'à l'inauguration de Radio Vatican, il avait décrit la radio comme une «famille» plutôt que comme un moyen de diffusion où les auditeurs sont passifs.

Au Vatican, le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical de la Culture, a lui aussi un compte Twitter faisant en quelque sorte office de bréviaire.

«Comme dans un cocktail»

«Avec un compte Twitter, on peut plus facilement proposer des sujets de conversation dans la grande conversation sur l'internet, explique Mgr Dowd. On ne peut pas faire de grands exposés théologiques. C'est un peu comme dans un cocktail. On se promène avec un verre de vin et on entend des bribes de conversation. Quand ça nous intéresse, on s'y attarde.»

«Je me sers de mon compte Twitter pour proposer des réflexions, pour renvoyer à des sujets sur mon blogue, par exemple. Ou alors, pour communiquer mes réflexions avec mon téléphone cellulaire, quand je suis en voyage et que je ne peux pas bloguer. À Québec, Mgr Lacroix s'en sert aussi pour annoncer ses visites pastorales, pour les gens qui veulent le voir en personne.»

Né à Montréal et au deuxième rang des plus jeunes évêques du monde, Mgr Dowd s'est aussi servi de Twitter pour partager ses émotions dans la journée précédant son ordination épiscopale. «Les gens voulaient savoir si j'étais nerveux. Mais je n'ai pas twitté durant la célébration. Seulement avant et après.»

Des cardinaux pourraient-ils twitter durant un conclave où on élit un pape? «Non, il ne peut pas y avoir de communications avec le monde extérieur», dit Mgr Dowd.

Une rapide vérification permet de constater que les prélats se servent généralement de Twitter comme Mgr Dowd, pour donner des références plutôt que pour écrire directement. Même Antonio Spadaro, le «cyberthéologien» jésuite romain, se limite à décrire les prochains articles de Civiltà Cattolica.

«Je vois mal un évêque passer sa journée devant un écran pour écrire des tweets, explique Mgr Dowd. On a beaucoup de gens à voir, un travail pastoral, des contacts humains.»

Une exception notable est le cardinal Ravasi, qui émaille son compte Twitter de courtes citations provenant de la Bible, d'oeuvres de théologiens ou du corpus des catholiques célèbres, comme Jean-Paul II.

Nommé par Benoît XVI, Mgr Ravasi, qui a fait sa thèse de doctorat sur la poésie de la Bible, partage avec le pape une attirance pour le lyrisme intellectuel catholique qui rendent ses tweets particulièrement savoureux.

Par ailleurs, un groupe de chrétiens américains s'est carrément lancé dans la publication de la Bible tweet par tweet. Un projet qui durera... 86 ans.

La foi en 140 caractères

«Allez partager la lumière du Ressuscité par votre vie lumineuse, habitée par l'amour et l'espérance.»

L'archevêque de Québec, Gérald Cyprien Lacroix, à l'occasion de Pâques.

@gclacroix

«Les Pères de l'Église utilisaient souvent des métaphores navales. Il est frappant de constater que la technologie a fourni une symbolique théologique.»

- Antonio Spadaro, le directeur de la revue jésuite italienne Civilt à Cattolica.

@antoniospadaro

«Pensée matutinale : le diable est un optimiste s'il pense pouvoir rendre les hommes plus mauvais.»

Le cardinal Gianfranco Ravasi, président du Conseil pontifical pour la culture.

@cardravasi