Les médias officiels chinois ont vivement attaqué le moteur de recherche sur internet Baidu, immensément populaire dans le pays, ce qui pourrait constituer, selon les analystes, une manifestation du malaise des autorités devant le pouvoir grandissant de la société.

C'est la deuxième fois que le groupe privé Baidu se retrouve sous le feu des critiques médiatiques, la télévision d'État s'en étant déjà pris à ses pratiques publicitaires par le passé, ce qui l'avait contraint à revoir une partie de cette activité.

La télévision nationale CCTV a de nouveau attaqué la firme -- qui représente plus des trois-quarts du marché de la recherche sur internet en Chine -- en début de semaine, dans une émission qui évoquait des fraudes par des annonceurs de Baidu.

Selon ce programme, diffusé sur la chaîne économique de CCTV, de faux billets d'avion, prétendument vendus par des annonceurs sur le moteur de recherche, ont fait perdre de l'argent aux utilisateurs.

«Baidu n'est manifestement pas capable de résoudre ce problème en faisant preuve d'auto-discipline. La motivation première d'une entreprise, c'est de faire des profits», a expliqué Wu Yue, la présentatrice du programme, aux téléspectateurs.

«S'il n'y a pas de loi ou de régulation en place pour limiter cela, il est difficile d'améliorer la situation à la base», a-t-elle ajouté.

Le Quotidien du Peuple, porte-parole du Parti communiste au pouvoir, a lui aussi critiqué Baidu mardi dans un éditorial. Il estime que le moteur de recherche pourrait être «abandonné» par les internautes s'il ne se concentre que sur ses bénéfices à court terme.

«Il est temps pour Baidu d'endosser une responsabilité sociale», est-il expliqué.

Un porte-parole de Baidu s'est refusé à tout commentaire.

Bill Bishop, un analyste indépendant basé à Pékin, également conseiller dans les start-ups internet, voit plusieurs théories pour expliquer ces critiques, notamment de possibles machinations par des concurrents actuels ou potentiels.

«Baidu est réellement en situation de monopole dans la recherche internet», écrit-il sur son blogue DigiCha. «Il est peu probable que le gouvernement apprécie le pouvoir de Baidu sur le marché, et le reportage de CCTV est peut-être le signe que Baidu va devoir s'attendre à un examen accru et à des réglementations», ajoute-t-il.

En 2008, CCTV avait déjà attaqué le moteur de recherche, qui avait autorisé les annonceurs à payer pour apparaître à côté des meilleurs résultats d'une recherche, sans préciser aux utilisateurs qu'il s'agissait d'une publicité.

Ces critiques avaient contraint Baidu à revoir ses pratiques publicitaires.

Coté au Nasdaq, la société est l'une des plus grosses valeurs internet mondiales, avec une capitalisation de 48 milliards de dollars.

Les critiques à son égard ont fait baisser son cours de plus de 8% cette semaine.

Dick Wei, un analyste de JP Morgan basé à Hong Kong, estime que ce problème pourrait avoir un impact à court terme sur le revenu de l'entreprise, mais il reste optimiste sur le long terme.

«Étant donné son différentiel technologique et son leadership sur le marché, nous pensons que les perspectives à long terme pour Baidu sont toujours très positives», dit-il.