Il n'y a pas que les régimes totalitaires qui doivent se méfier de Twitter. Les élus américains aussi. Las du dialogue de sourds entre démocrates et républicains, des dizaines de milliers d'internautes américains ont pris d'assaut les médias sociaux, souhaitant la création d'un troisième parti, centriste, dont le fonctionnement passerait entièrement par internet.

Le week-end dernier, Thomas Friedman, chroniqueur au New York Times, a exprimé le souhait de voir un tel parti se former. Au même moment, son collègue journaliste Jeff Jarvis a lancé un cri de rage sur Twitter: «Peut-on lancer ce cri de ralliement: Va te faire foutre, Washington! «

En anglais, #FuckYouWashington est instantanément devenu le mot-clic le plus populaire chez nos voisins du Sud. Il l'est encore aujourd'hui, près d'une semaine plus tard. Vous ne le verrez toutefois pas sur Twitter, le service bloque les mots-clics contenant des termes vulgaires (essayez des sites tiers, comme Trendsmap).

Ces deux événements médiatiques se sont rapidement entremêlés, donnant des munitions à AmericansElect.org, un organisme cité par Friedman, qui compte redéfinir le processus électoral présidentiel en le faisant passer par l'internet, au lieu d'un collège électoral plus ou moins représentatif de la carte électorale du pays.

Les Américains n'ayant pas le luxe d'un NPD (Nouveau Parti démocratique) pour faire connaître leur mécontentement aux plus vieux partis, l'idée d'une troisième voie centriste, plus ouverte aux compromis politiques que l'âne et l'éléphant, fait son chemin.

De là à sa création, il y a un pas que ne franchirait pas Marc-François Bernier, titulaire de la chaire de recherche sur la francophonie canadienne en communication, spécialisée en éthique du journalisme, à l'Université d'Ottawa.

Si certains ont associé la révolution dans des pays arabes, le printemps dernier, à l'utilisation massive de nouvelles technologies sur leur territoire, les chances qu'une nouvelle voie politique émerge aux États-Unis à partir de Twitter sont plutôt minces, dit-il. Quoi qu'en disent leurs promoteurs, les médias sociaux demeurent, à ce jour, un épiphénomène.

«Un message n'a toujours que l'influence que le récepteur lui accorde. Il y a certainement un cynisme ambiant qui ouvre la voie à des mouvements alternatifs, mais dans un pays comme les États-Unis, un grand mouvement dans les médias sociaux ne se traduira pas nécessairement par une action concrète.»

Twitter n'a peut-être pas encore un rôle aussi important que les grands médias dans la formation de l'opinion publique, mais elle s'en approche chaque jour un peu plus. À tort ou à raison, les grandes chaînes d'information américaines diffusent désormais les billets de leur auditoire en direct. Le président Barack Obama a récemment tenu une audience publique sur cette plateforme.

Depuis une semaine, les analystes politiques américains ne se demandent plus si Twitter a sa place dans la politique, mais jusqu'où ira son influence. Après le printemps arabe, verra-t-on apparaître, au cours des prochaines semaines, l'été américain?

alain.mckenna@lapresseca

APPLICATION DE LA SEMAINE

Byliner: brûlots, pamphlets et autres essais sur demande

Les maisons d'édition aiment ces petits livres d'une centaine de pages sur un sujet d'actualité, mais le temps nécessaire pour les imprimer et les distribuer modère souvent leur engouement. Pas de ça avec Byliner.com, un service web et souvent gratuit de distribution de ces longs essais. Pouvant aller jusqu'à 35 000 mots, ces textes sont conçus de manière à être lus en deux heures. Parfait pour ces longs trajets en autobus...

JEU DE LA SEMAINE

Gods Arena: jeu de rôle sur le pouce

Parce qu'ils sont souvent trop longs, les jeux de rôle ne tiennent pas aussi bien sur un téléphone que les jeux grand public. Gods Arena, du développeur montréalais Cravio, mêle un peu des deux dans Gods Arena, un superbe jeu pour iOS dont les niveaux durent une dizaine de minutes tout au plus. Ça peut devenir redondant, mais comme c'est gratuit...