Sohaib Athar, auteur d'un des twitts les plus célèbres au monde, veut juste qu'on le laisse dormir, après avoir relaté en direct, sans le savoir, un événement d'importance planétaire: l'attaque de l'armée américaine contre Oussama Ben Laden au Pakistan.

«Ben Laden est mort. Je ne l'ai pas tué. S'il vous plaît, laissez-moi dormir à présent», a-t-il écrit alors que l'histoire de son twitt s'est répandue comme une traînée de poudre sur la toile.

Venu chercher le calme dans la petite ville d'Abbottabad, le consultant en informatique était un simple contributeur à Twitter. Jusqu'à ce qu'il entende le son d'hélicoptères dans la nuit de dimanche à lundi, près de sa maison, et s'en plaigne sur le site de microblogs.

Il est à présent une star du web et son compte Twitter était suivi mardi par quelque 90 000 personnes. Le jeune homme de 33 ans a reçu quantité de mails et de demandes d'interviews par des médias du monde entier et son blog a même été attaqué par des pirates informatiques.

Mais Sohaib Athar, «18 ans d'expérience dans la programmation et sept ans dans la paternité», n'a aucune envie de rester sous le feu des projecteurs, et a ignoré la plupart des demandes d'interviews.

«Je suis assis et connecté. L'électricité n'est toujours pas revenue et les guerres n'ont pas disparu. Le monde n'a pas changé», disait-il mardi dans un message.

Tout a commencé avec quelques mots twittés dans la nuit de dimanche à lundi, depuis sa maison d'Abbottabad, dans les collines, à une heure d'Islamabad: «un hélicoptère survole Abbottabad à une heure du matin (c'est rare)», suivi de «va-t-en hélicoptère avant que je ne sorte ma tapette géante».

Selon la présentation de son profil sur Twitter, Sohaib Athar a décidé de «faire une pause et de fuir la ville et la course permanente en se réfugiant dans les montagnes» avec son ordinateur.

«Une énorme fenêtre explose près d'ici, dans le quartier militaire d'Abbottabad. J'espère que ce n'est pas le début de quelque chose qui va mal tourner», écrit-il sous le nom de «ReallyVirtual».

«Tout est silencieux après l'explosion mais un ami l'a entendue à 6 km de distance. L'hélicoptère est parti», ajoute-t-il un peu plus tard. «On dirait que ma tapette géante a marché», blague-t-il, en mettant un lien vers un article sur un accident d'hélicoptère.

Il commence ensuite à avoir des doutes sur cette affaire: «les quelques personnes qui sont en ligne à ce moment de la nuit disent que l'un des hélicoptères n'était pas pakistanais».

«C'est drôle car déménager à Abbottabad entrait dans ma stratégie de calme et de sécurité», plaisante-t-il encore. Et de s'interroger: «puisque les talibans n'ont probablement pas d'hélicoptère et puisqu'on me dit qu'il ne s'agit pas des nôtres, la situation doit vraiment être tordue».

Un peu plus tard encore, un des lecteurs de Sohaib Athar fait le lien entre les événements relatés dans le twitt et l'annonce d'une conférence de presse exceptionnelle du président américain. «Je crois que le crash d'hélicoptère à Abbottabad au Pakistan et l'annonce de la conférence de Barack Obama ont quelque chose à voir l'un avec l'autre».

Le consultant en informatique comprend alors qu'il a été le premier à parler de cet événement planétaire, sans avoir la moindre idée de son importance. «Oussama ben Laden tué à Abbottabad, Pakistan. L'ISI (les services de renseignements pakistanais: ndlr) l'a confirmé. Oh là là, parlez-moi donc des voisins!», blague-t-il. «Oups, maintenant je suis le type qui a blogué en direct sur le raid contre Oussama sans le savoir».