Le dalaï lama, chef spirituel des bouddhistes tibétains en exil, s'est pour la première fois entretenu en ligne vendredi avec des internautes chinois, via le site de micro-blogs Twitter, lui-même relayé par des sites tiers.

Pendant cet échange d'environ 90 minutes, le dalaï lama a abordé un large éventail de sujets, politiques, culturels ou religieux. Il a notamment estimé qu'une décennie de discussions avec Pékin sur l'autonomie du Tibet et son éventuel retour avait échoué parce que le gouvernement chinois avait refusé de reconnaître les problèmes auxquels cette région himalayenne est confrontée.

Les discussions n'ont pas progressé «parce que le gouvernement central a toujours soutenu qu'il n'y avait pas de problèmes au Tibet, qu'il y avait uniquement des problèmes avec le dalaï lama», a-t-il déclaré depuis New York.

«Je ne demande rien pour moi même, ma principale préoccupation porte sur les problèmes auxquels sont confrontés la culture, la religion et l'environnement du peuple tibétain», a-t-il ajouté. «Dans certaines zones du Tibet, la culture et la langue tibétaines sont en crise à cause de l'augmentation du nombre des Hans», l'ethnie très fortement majoritaire en Chine, a souligné le dalaï lama.

Wang Lixiong, un auteur chinois, critique de la politique de Pékin au Tibet, avait annoncé sur Twitter qu'il prêterait son compte pour cet échange avec le prix Nobel de la Paix, que Pékin accuse de séparatisme et cherche à museler.

Plus de 12 500 personnes avaient sélectionné 289 questions pour le dalaï lama, qui a par le passé été qualifié par Pékin de «loup dans des habits de bure».

Les questions avaient été sélectionnées au cours d'un vote en ligne sur Google Moderator, une application de Google permettant ce type d'opérations, a expliqué Xiao Qiang, qui dirige le China Digital Times, basé aux Etats-Unis. Le dalaï lama, qui est âgé de 74 ans et qui vit en exil en Inde, n'a cependant répondu qu'à quelques questions.

Twitter, sur lequel le dalaï lama a un compte, est bloqué en Chine. Mais même sans proxy pour détourner la censure et s'y connecter, les internautes chinois pouvaient accéder au «chat» avec le responsable religieux car Twitter autorise d'autres applications et serveurs à utiliser son service à leur guise.

Le site de micro-blogs est de ce fait largement disponible dans le pays en dépit du «Grand parefeu» mis en place par les autorités pour filtrer le contenu de l'internet, a indiqué Xiao par téléphone.

Selon lui, cette «grande muraille de l'internet» a plutôt suscité la croissance de Twitter en Chine: «cette communauté a un lien politique particulièrement fort, qui est l'anticensure. De nombreuses discussions sur Twitter sont au sujet de la liberté d'internet, et sur la façon de contourner le "grand parefeu"», a-t-il dit.

Environ 100 000 Chinois, vivant en Chine, seraient sur Twitter, estime-t-il.