En tapant une adresse en idéogrammes, l'internaute chinois arrive en réalité sur une version chinoise du site en question. Une version préalablement aspirée, vérifiée et remise en ligne par les autorités. Résultat? Tout internaute chinois utilisant les idéogrammes est cantonné sur un sous-réseau, déconnecté de la Toile et directement contrôlé par Pékin.

Depuis le 1er septembre 2006, le serveur de noms de domaines [DNS, qui fait le lien entre les adresses IP numériques des ordinateurs connectés à Internet et les adresses des sites écrites en lettres] chinois ne passe plus par l'Icann, l'organisme international qui gère les noms de domaines (les adresses de sites) de l'Internet. Cette réforme de gestion des DNS répond à un objectif officiel de la Chine: permettre aux Chinois d'accéder à Internet en composant les adresses de sites avec des idéogrammes, une solution confortable pour les internautes.

La Chine a donc mis en place un nouveau système de gestion de noms de domaines ou plutôt un deuxième étage, comme l'explique l'informaticien Laurent Bloch. «Un premier niveau accepte les noms de domaines en idéogrammes, mais qui sont modifiés par rapport aux noms de domaines internationaux pour ne donner accès qu'aux sites installés sur le territoire chinois. Ainsi, pour les adresses de sites se terminant en ".com.cn" ou en ".net.cn", le suffixe ".cn" n'apparaît plus à la fin dans la fenêtre du navigateur.» L'internaute chinois termine ainsi sa navigation sur un site filtré et contrôlé par Pékin.

L'ensemble du dispositif, qui inclut aussi une gestion d'accès aux sites étrangers, s'appelle Bouclier doré.

L'objectif est le même qu'un pare-feu entre la Chine et le reste du monde: isoler la Chine. Mais la méthode est radicalement différente et a des conséquences sur l'architecture de l'Internet. 

Cet éclairage donne une autre tournure à l'affaire qui oppose Google et la Chine depuis quelques semaines. Le subit revirement de Google et du gouvernement américain en faveur de la liberté d'accès à l'Internet pourrait bien masquer un bras de fer plus subtil pour éviter la possible dislocation du réseau des réseaux en une multitude de réseaux incompatibles entre eux.

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