Pour sa première visite en Chine, où Facebook comme Twitter sont censurés, le président américain Barack Obama, adepte des nouvelles technologies, a utilisé lundi l'internet, défendant une Toile sans chaînes.

L'ambassade des États-Unis avait préparé le terrain en recevant la semaine dernière plus d'une dizaine de blogueurs, parmi les plus connus, et le site de la Maison blanche a retransmis en direct cette rencontre avec des étudiants de Shanghai triés sur le volet.

Cette formule, inédite en Chine pour un chef d'État étranger, avait été largement utilisée par M. Obama, un fan des outils de communication hi-tech, durant sa campagne électorale.

Mais la question de l'internet et de sa censure n'a pas été posée par la salle, mais par l'ambassadeur Jon Huntsman, relayant des questions recueillies sur le site de son ambassade: «Dans un pays avec 350 millions d'internautes et 60 millions de blogueurs, connaissez-vous le firewall? «Devrions-nous pouvoir utiliser librement Twitter?»

Le système de filtrage chinois est surnommé le GFW -- Great Firewall --, jeu de mots reprenant Muraille de Chine et firewall, «parefeu».

«Je suis un partisan farouche de l'absence de censure», a expliqué le président américain, qui a reconnu ne jamais avoir utilisé Twitter.

Twitter, comme le site de socialisation Facebook, a été bloqué par les autorités chinoises depuis les émeutes meurtrières du Xinjiang musulman (nord-ouest) en juillet dernier. Et n'est accessible que grâce à des «proxy», des serveurs capables de déjouer la censure.

Le discours d'Obama a été salué par nombre d'internautes chinois, certains soulignant que la mention de «la Grande Muraille de l'internet» était passée entre les mailles du filet et publié sur 30 sites internet du pays.

«La réponse d'Obama sur le GFW a été très intéressante, car il est le premier président à en parler et cela conduira le gouvernement chinois à réfléchir», a déclaré à l'AFP «Beifeng» (Vent du nord), un blogueur chinois résidant dans le sud du pays.

«J'espère qu'il pourra user de son influence auprès du gouvernement chinois (...) mais les internautes chinois devraient essayer de négocier avec le gouvernement de leur propre chef et se servir aussi de l'influence d'Obama», a déclaré de son côté Zuola, une vedette de l'internet chinois, également interrogé par l'AFP.

Sur Twitter, qui a fourmillé de réactions avant, pendant et après la rencontre de Shanghai, beaucoup ont cependant dénoncé une opération de communication.

Une opinion partagée par Zuola: «Ce discours a été un spectacle, car la liste des étudiants a été décidée de manière interne, il n'y a pas eu de système de désignation transparente», a-t-il dit à l'AFP.

«C'est un jeu joué par Obama et les étudiants, sous la supervision du gouvernement chinois», a-t-il ajouté.

À Obama qui avait lancé dans son discours -- «Je vois l'avenir de la Chine en vous --, des internautes ont répondu de manière ironique: «Ce que j'ai vu, c'est surtout une bande de futurs bureaucrates»...

«Les gens qui ont désigné les étudiants sont stupides. Nous avons fait des recherches sur l'internet, les étudiants sont des cadres de la Ligue de la jeunesse communiste ou du Conseil des étudiants, ils n'ont pas posé les questions qui nous concernent vraiment», dit pour sa part Beifeng.

Nicholas Bequelin, chercheur à la division Asie de Human Rights Watch, basé à Hong Kong, a estimé de son côté que «sur la censure et l'internet (...), il (Obama) n'a pas répondu directement à la question».

«Il a exprimé une position en disant que sur le plan des valeurs politiques américaines ou personnelles il était pour la non-censure, mais il a immédiatement ajouté que différents pays avaient différentes traditions», a-t-il relevé.