Créé dans les heures qui ont suivi la mort du cinéaste et militant indépendantiste, le 26 septembre dernier, le projet «Changeons le nom de la rue Amherst en rue Pierre-Falardeau» a connu un succès sans équivoque sur Facebook, attirant plus de 6000 membres en une semaine.

Son créateur, Louis Préfontaine, un blogueur montréalais qui se décrit comme un «électron libre», y voit la suite logique de la croisade du conseiller municipal Nicolas Montmorency, qui avait déposé une pétition de 2389 noms au conseil à la fin du mois d'août. Faute d'appui, sa motion n'avait pas été discutée.

 

«Je trouve que c'était une idée excellente, mais elle avait un côté négatif: on voulait enlever un nom, explique au bout du fil M. Préfontaine, employé à temps partiel au service à la clientèle d'une entreprise. Là, on milite pour honorer une personnalité en lui donnant un nom de rue.»

Le blogueur, qui propose depuis trois ans ses coups de gueule et ses analyses sur le web, est bien conscient de la controverse entourant la personne de Pierre Falardeau. Il y répond sans détour sur son site: «Falardeau était mal engueulé, parlait le joual et insultait parfois ses adversaires: pourquoi l'honorer? Falardeau avait ses défauts, comme tout le monde, et on pouvait l'aimer ou le détester. Mais il a marqué le Québec, tant par ses films que par ses actions politiques. Il est le plus grand cinéaste québécois et ses films ont toujours exploré l'inconscient québécois, le manque de fierté, nos défaites ou nos petites victoires. C'est un homme du Québec. Il représentait ce que nous avions de meilleur et de pire en chacun de nous.»

Le groupe reprend l'argument principal du conseiller Montmorency, le fameux «passé génocidaire de Amherst, qui a infecté des Amérindiens avec des couvertures infectées à la petite vérole». Il n'est toutefois pas «nécessaire» que la rue choisie pour honorer Pierre Falardeau soit Amherst, ajoute-t-il. «Mais on peut commencer par cette rue qui nous fait honte à tous. Après, on verra. Pourquoi pas une rue Pierre-Bourgault ensuite? Il faut être pragmatique: le fer est chaud, forgeons-le immédiatement.»

Ce souverainiste convaincu propose du même souffle des rues Robert-Bourassa et Claude-Ryan. «Ryan était fédéraliste, mais il était un défenseur de notre culture et de notre langue, même si, à la fin, il a eu tort.»

Il espère atteindre les 10 000 noms dès la semaine prochaine. Il compte sur les appuis du président de la Société Saint-Jean-Baptiste, Mario Beaulieu, et du militant souverainiste Patrick Bourgeois. Aucun leader sur la scène municipale, et aucun politicien souverainiste, n'a voulu afficher son accord avec cette initiative.

«Ils sont assez craintifs, ils attendent de voir de quel côté le vent va tourner, affirme M. Préfontaine. J'aimerais qu'un politicien se saisisse de ce dossier et dépose une motion au conseil municipal, ce serait l'idéal. Après tout, si on atteint les 10 000 noms, ce sont 10 000 électeurs, ç'a du poids.»

 

Montréal et la toponymie

Parmi les règles qui régissent la désignation des rues, la Ville de Montréal exclut notamment les noms: - de personnes vivantes; - de personnes décédées depuis moins d'un an; - susceptibles de provoquer ou d'alimenter des dissensions au sein de la population; Source: ville.montreal.qc.ca