Le célèbre site internet YouTube est devenu un endroit de prédilection pour qui veut déverser son fiel contre les élus de Montréal et grands dirigeants municipaux. Depuis un mois, l'ancien président et bras droit du maire de Montréal, Frank Zampino, sert de cible dans une capsule vidéo intitulée Free Zampino.

Le maire Gérald Tremblay n'est pas non plus épargné, ni le grand dirigeant des pompiers de Montréal, Serge Tremblay, ni Benoit Labonté, chef de l'opposition, surnommé «Ti-Ben Labonté» sur YouTube.Sous le pseudonyme «Mon point de vue», un dénommé Gabriel Roy, 28 ans, de Brossard, coiffé d'une casquette mais à visage découvert, traite M. Zampino d'«ostie de crosseur». La capsule vidéo de deux minutes et demie a été visionnée près de 1000 fois depuis 30 jours et fait l'objet de plusieurs commentaires. L'internaute, dont le fan club compte plusieurs membres, a déjà mis une soixantaine de vidéos en ligne dans YouTube.

Dans le clip sur Frank Zampino, on voit des photos de Tony Accurso, codirigeant de GÉNIeau, le consortium qui a obtenu le contrat des compteurs d'eau, le plus important de l'histoire de Montréal. L'auteur du clip, qui se décrit comme «un emmerdeur internationalement reconnu», explique pourquoi il estime que Frank Zampino est en conflit d'intérêts. Il termine sa capsule en faisant un long doigt d'honneur à l'ancien responsable des finances de l'administration municipale.

Le porte-parole de Frank Zampino, Gilles Corriveau, de la firme Enigma, a visionné la capsule sur YouTube, hier après-midi, après que La Presse l'eut informé de son existence.

«Mon client n'est pas au courant, a dit M. Corriveau d'un ton dégoûté. Et je ne ferai pas de commentaires. Je ne sais pas encore si je vais l'informer. Vous savez, il est sans emploi aujourd'hui.» Il a fait remarquer que M. Zampino n'est plus un personnage public.

Pas le seul

D'autres capsules déplorant l'affaire des compteurs d'eau ont été mises en ligne sur YouTube au cours des derniers mois. Dans l'une d'elles, intitulée La croisière abuse, le maire Gérald Tremblay reçoit un titre pour sa «toujours non-participation», en allusion au nombre de fois où il a dit qu'il n'était pas courant de la croisière de M. Zampino sur le bateau de Tony Accurso.

Le bras de fer syndical des pompiers contre la direction du Service de sécurité incendie de Montréal s'est aussi transporté sur le site. Depuis trois mois, à raison d'une capsule vidéo par mois, des messages adressés au directeur Serge Tremblay sont mis en ligne.

La dernière capsule est diffusée sous le pseudonyme Fireman 362. Sur l'air de la chanson Sex Bomb de Tom Jones, dans une performance vocale pour le moins discutable, un chanteur traite à plusieurs reprises le grand dirigeant des pompiers de «petit roi».

Depuis qu'elle a été mise en ligne, la capsule a été visionnée plus de 500 fois. Les deux autres, mises en ligne à la mi-mars et à la mi-avril, ont été visionnées plus de 3000 fois.

À la direction du SIM, Louise Tremblay, chef de division et porte-parole du directeur, a expliqué à La Presse qu'elle était au courant de la campagne vidéo diffusée sur YouTube. Des informations ont été recueillies auprès du Service de police de la Ville de Montréal afin de faire retirer les capsules, a-t-elle dit.

«Pour le directeur, a-t-elle ajouté, ces messages qui portent atteinte à la vie professionnelle et personnelle des gens constituent un manque flagrant de respect et sont franchement dépassés. Serge Tremblay a toujours eu énormément de respect pour ses employés. Il estime que les capsules sont le fait d'une faible minorité de pompiers ou encore de certaines personnes qui ont des intérêts personnels et qui désirent entacher sa réputation.»

Joint en début de journée hier, le porte-parole de l'Association des pompiers de Montréal, Laurent Arel, a dit que le vice-président du syndicat, Alain Nault, n'était pas au courant des vidéos.

«Rappelez-nous la semaine prochaine», a demandé M. Arel, sans formuler d'autres commentaires.

Du côté du cabinet du maire de Montréal, son porte-parole, Martin Tremblay, a indiqué au sujet de la capsule La croisière abuse qu'il s'agissait d'un dossier «anecdotique». «Nos citoyens seront contents de savoir que nous avons d'autres priorités à traiter», a-t-il ajouté au nom de Gérald Tremblay.

Joint par La Presse, Gabriel Roy dit: «Si tu ne t'occupes pas de la politique, elle va s'occuper de toi.» «Je pense qu'on a le droit d'exprimer son opinion, mais il faut avoir le courage de montrer son visage et de donner son vrai nom, a-t-il dit. Ce qui arrive à Montréal est scandaleux. Ceux qui regardent mes vidéos sont généralement dans la vingtaine, et ils ont le droit d'être informés. Mais si M. Zampino veut me rencontrer, je suis prêt à prendre un café avec lui et à l'écouter.»

Règles sur YouTube

Sur son site, YouTube demande aux internautes de respecter plusieurs règles, notamment en matière de pornographie. On y précise aussi: «Les vols, persécutions, menaces, harcèlements, le non-respect de la vie privée ou la divulgation de données personnelles d'autres membres ne seront pas tolérés.» Un lien permet par ailleurs de signaler le contenu jugé inapproprié.