Alors, combien d'amis Facebook comptez-vous? Si vous n'en avez aucun, avez-vous des amis qui, eux, sont remplis d'amis Facebook? Si la réponse est non, c'est que vous êtes out. Désolée. Remarquez que je le suis tout autant car ce type de réseau social informatique ne m'a jamais attirée non plus, et encore moins depuis cette semaine.

C'est que j'ai écouté un documentaire qui me conforte dans ce choix. Ceci dit, l'émission m'a permis aussi de démystifier complètement la bête et de pouvoir aujourd'hui avoir une idée passablement plus claire de ce mégaphénomène de société.C'est RDI qui diffusera le tout lundi soir, 20 h, aux Grands Reportages. Il s'agit en fait d'un documentaire français réalisé par l'émission Envoyé spécial, qui suit ce phénomène jusqu'à nous faire rencontrer son créateur, Mark Zuckerberg, aujourd'hui milliardaire à 24 ans.

Ce petit génie de l'informatique, tout timide comme on peut le constater en entrevue, a créé la bête dans un dortoir de l'université Harvard il y a quatre ans, soucieux d'aider d'autres étudiants en échangeant de l'information.

Pendant les deux premières années, le réseau est demeuré privé mais voilà qu'il s'est ouvert au monde entier depuis deux ans, avec pour résultat que le serveur regroupe actuellement 150 millions d'utilisateurs. Et pas les moins illustres si l'on pense que Barack Obama y a grandement influencé son élection en s'alliant 3 millions de supporteurs.

Chaque jour, 200 000 nouveaux s'y inscrivent, ce qui nous renvoie spontanément aux prévisions de Marshall McLuhan sur un éventuel immense village global. Et bien voilà, il est bel et bien créé ce village. Quand on demande aux utilisateurs la raison de leur engouement pour Facebook, la même réponse est sur toutes les lèvres: «Pour rester en contact.» Le tout est convivial, facile d'utilisation et gratuit, de sorte qu'on peut d'ailleurs facilement y devenir accroc, notent les utilisateurs.

Dans cet espace virtuel, chacun s'y crée une page personnelle, décrit son profil, avec option politique et religion parfois, étale ses intérêts, ses activités et ses humeurs. On y retrouvera aussi des photos à profusion, certaines affichant les décolletées plongeants de jeunes filles, ou des images compromettantes captées lors de soirées très arrosées. C'est la norme chez plusieurs et quelques témoignages nous apprennent que la circulation des images peut être nocive à l'usage, pour certains couples. Mais encore, les jeunes peuvent y dénicher toutes les informations nécessaires pour trouver telle ou telle sorte de drogue.

Or voilà, toutes ces données sont conservées et ne s'effacent plus vraiment par la suite. C'est donc dire que dix ans plus tard, avec un profil tout à fait changé, on peut tout aussi bien craindre qu'une folie de jeunesse puisse se retrouver malencontreusement dans les bureaux d'un employeur affairé à voir à qui il aura à faire. Le village devient un peu moins réjouissant dans ces circonstances. Bref, aucune réelle confidentialité n'est assurée. Or là, on est en plein dans l'oeuvre de George Orwell, qui nous parlait, lui, du fameux Big Brother susceptible de nous surveiller partout.

C'est à San Francisco que sont situés les locaux de Facebook. Dans ce lieu, l'énorme serveur est manoeuvré par 700 salariés dont la moyenne d'âge est sous la barre des trente ans.

À eux tous, ils peuvent avoir le portrait précis de tout un chacun, des données à faire baver les organisations politiques ou les gens de la CIA.

Avec cette base de données planétaire, on peut par ailleurs tracer un profil précis de telle ou telle clientèle, des informations qui vaudraient leur pesant d'or pour tout créateur de publicités. Bref, autant les non-initiés que les surfers de Facebook auraient avantage à voir ce document, ne serait-ce que pour mesurer tous les risques encourus pour sa vie privée.