En faisant la revue de 2008, une chose semble claire: la vedette incontestée de l'année qui se termine aujourd'hui n'est pas un personnage isolé, ni même un événement en particulier. Ce n'est rien de moins que le réseau internet, qui s'est immiscé partout, des médias aux télécommunications et à la politique. Pour le meilleur ou pour le pire...

Car il n'y a pas eu que du bon en provenance du réseau des réseaux, pour les internautes canadiens du moins. L'année 2008 a confirmé la naissance d'un phénomène qui pourrait s'aggraver au fil des prochains mois: le contrôle du trafic internet par certains fournisseurs d'accès comme Bell, notamment. Cette pratique vise à limiter l'espace occupé par certains types d'échanges de données, comme le téléchargement poste-à-poste (P2P) à la BitTorrent.

Le géant informatique Google s'oppose à cette pratique, mais pas le CRTC, ce qui en déçoit plus d'un. Pour le président de l'Association canadienne des fournisseurs Internet (ACFI), Tom Copeland, le Canada vient de faire un pas dans la mauvaise direction. Philippe Le Roux, cofondateur de l'agence montréalaise VDL2, ajoute: «C'est toute la démocratie d'internet qui est remise en question. Ça ouvre la voie à un partage inégal de la bande passante qui avantage les gros joueurs industriels déjà établis. Le CRTC aide à maintenir l'oligopole des télécommunications au Canada.»

Mobilité au rabais

MM. Copeland et Le Roux ne sont pas les seuls à se plaindre. Du côté de la mobilité informatique aussi, l'année semble marquée par ce phénomène. «(La téléphonie mobile) au Canada a elle aussi des allures d'oligopole», constatait la semaine dernière Peter Diedrich, président de Mobivox, une PME montréalaise spécialisée dans les services mobiles de voix par internet.

M. Diedrich estime que cette situation a ralenti l'adoption de nouvelles technologies visant à offrir des services au rabais aux entreprises et aux consommateurs d'ici. «Les exploitants de réseaux ont des filiales d'investissement, mais ça demeure très difficile de percer sur leurs réseaux.» La technologie de Mobivox pourrait réduire à presque rien le coût des appels interurbains, mais aucun réseau canadien ne l'a encore adoptée, déplore son président, espérant que les nouveaux réseaux annoncés pour 2009 et 2010 changeront cette donne.

Ceux-ci promettent en effet un impact similaire à celui incarné par le lancement au Canada de l'iPhone, d'Apple, en juin dernier. Depuis, le coût du téléchargement de données sur un sans-fil a baissé de façon plus que substantielle, peu importe le réseau, stimulant une concurrence que même le gouvernement fédéral estimait trop faible, en début d'année. On saura en 2009 si la mise aux enchères de nouvelles fréquences, par Industrie Canada, accélérera cette tendance.

Les réseaux sociaux explosent

Parallèlement à ces deux phénomènes, les réseaux sociaux comme Facebook et MySpace ont explosé en 2008, passant du statut de jouets pour adopteurs précoces à portails grand public. Aujourd'hui, plus du quart des Canadiens sont inscrits à l'un ou l'autre de ces sites.

«Sur internet, 2008 a été l'année Facebook», illustre Philippe Le Roux, selon qui l'impact de cette tendance émergente est au moins double: d'abord, ça remet en cause le fonctionnement des médias, nouveaux ou traditionnels. «Les nouveaux réseaux sociaux forcent à trouver un nouveau modèle de rentabilité.» Il faudra trouver une solution de rechange à la publicité traditionnelle, qui s'essouffle. Il ajoute que l'«internet a aussi changé le cours de l'histoire des États-Unis», puisque leur prochain président doit une grande partie de son succès aux réseaux sociaux.

Pas mal, pour un phénomène encore marginal il y a un an à peine... «Ça laisse présager qu'il existe d'autres dimensions de l'internet pas encore découvertes qui pourraient avoir encore plus d'impact», conclut le porte-parole de VDL2. Ça promet pour 2009!