À 41 ans, Wang Zhidong, créateur d'entreprises en série, dont le plus grand portail internet du pays, incarne la Chine de la technologie et de l'innovation, dans laquelle il s'est jeté aux premières heures de l'ouverture du pays.

Originaire du Guangdong, Wang, jeune homme, ne suit pas la voie royale qui s'ouvre alors dans le sud du pays: sa province est choisie comme terrain d'essai économique et devient le berceau de la manufacture et du commerce avec l'étranger, sur lequel le pays a assis ses 30 ans de prodigieuse croissance.

A 17 ans, en 1984, il entame à Pékin des études d'électronique et informatique, domaine tout neuf.

Aujourd'hui, le classement Hurun des 1000 plus grandes richesses de Chine le crédite d'une fortune 190 millions de dollars.

Dans son bureau exigu de l'entreprise de systèmes informatiques Dianji - sa dernière aventure professionnelle -, Wang, en jeans et polo, n'offre pas l'image convenue d'un golden boy.

Ce père de faux jumeaux de huit ans professe un goût pour le travail et la vie de famille, plutôt que le luxe et les voitures de sport, même s'il aime golf et voyages.

Il raconte, avec simplicité et humour, un parcours qui a accompagné la marche de la Chine vers la modernité.

«J'ai créé mes premières entreprises sans grands investissement ni garantie. A l'époque, on n'était pas "actionnaire", la loi ne disait pas qui était propriétaire de l'entreprise. Si on partait, on ne l'était plus», raconte-t-il.

Son «goût pour les défis» lui mettra le pied à l'étrier. Sorti de l'Université, il est simple vendeur dans une entreprise d'électronique. Un client lui parle d'un problème: adapter sur un même ordinateur deux systèmes différents, apparemment incompatibles, dont l'un développé par Founder, émanation de l'Université de Pékin.

Le jeune homme résout la question. Le client, triomphant, s'empresse d'aller voir Founder qui jugeait l'affaire impossible.

Aussi Founder se tourne-t-il vers Wang lorsque l'entreprise reçoit une requête similaire quelques mois plus tard.

Intégré peu après dans le groupe, Wang, 22 ans, s'attèle à un autre défi: adapter et traduire en chinois le système d'exploitation pour ordinateurs Windows, produit par l'américain Microsoft. À l'époque la Chine n'est pas un marché Microsoft et l'utilisateur chinois n'a accès qu'à Windows en anglais.

Il travaille deux mois, chez lui, boucle l'affaire, se jette aussitôt dans l'adaptation d'une deuxième version de Windows et enfin, en 1990, d'une troisième, toujours plus sophistiquée. Il y parvient, avec «des méthodes très nouvelles» et «a l'impression d'avoir franchi un cap». Mais Founder ne croit pas qu'il ait pu faire «quelque chose de bon tout seul dans son coin».

La reconnaissance de l'industrie viendra, et la renommée, à 23 ans. Il reçoit des offres de l'étranger. «J'admirais Silicon Valley, les histoires de création d'entreprises à la Steve Jobs» le fondateur de l'américain Apple.

Il cofonde une première société de logiciels, puis une seconde, et découvre l'internet en 1995 lors d'un voyage aux États-Unis.

«C'était la première fois que je l'utilisais. J'ai développé un culte».

De ce culte, sortira un premier site, simple forum pour les quelques dizaines de milliers d'internautes chinois de l'époque, puis, grâce à des Taiwanais établis aux États-Unis, le fameux sina.com qui voit le jour en 1999, se taille immédiatement la part du lion dans l'internet chinois et est introduit au Nasdaq.

Il restera deux ans à sa tête, avant des dissensions avec le conseil d'administration sur les stratégies de développement, puis quittera l'entreprise.

Il est «optimiste» pour sa dernière-née, Dianji Technologies, sept ans ce mois-ci et plus de 100 employés. «Il y aura de plus en plus besoin de services pour l'internet, qui va devenir incontournable, comme l'électricité».