Montréal se définit comme un pilier nord-américain du divertissement interactif et du cinéma. Ce n'était qu'une question de temps avant que quelqu'un ne fasse le pont entre ces domaines et le web 2.0. Le résultat: Xtranormal, une start-up dont l'objectif est de rendre la production d'animations 3D accessible à tous, de la même façon que Youtube a simplifié la distribution de contenu vidéo.

La vidéo sur l'internet n'est plus un phénomène naissant. En Amérique du Nord, environ 115 millions d'internautes en visionnent régulièrement. Selon une analyse effectuée par la société eMarketer, pas moins de 80% des internautes sont, en réalité, de fidèles «webtéléspectateurs» (le terme est à inventer), puisqu'il regardent ou téléchargent du contenu vidéo au moins une fois par mois, tous genres confondus.Grâce à la prolifération de l'accès à large bande, les internautes sont un auditoire en croissance pour les productions vidéo. Grâce à la souplesse du numérique, ils sont également nombreux à réaliser eux-mêmes ce contenu vidéo. La preuve: le contenu créé par des professionnels de l'image ne compte que pour 6% de la production vidéo sur l'internet.

La réalisation pour les nuls

Le fondateur de Xtranormal, l'ancien dirigeant de Softimage et de Discreet Logic Richard Szalwinski, pense que cet énorme bassin de spectateurs et de producteurs amateurs apprécierait un outil simplifié de production et de partage d'animations 3D. «Xtranormal est un outil de réalisation de séquences vidéo qui ne demande aucune expertise technique», ajoute Jean-François Deschênes, directeur général de l'entreprise fondée en 2006. En fait, on n'a besoin d'aucun matériel, puisque les séquences vidéo sont des animations 3D créées de toutes pièces par une intelligence artificielle développée par Xtranormal.

L'internaute choisit parmi une quinzaine d'environnements, qu'il s'agisse d'un studio de télévision, d'un bar ou d'un vestiaire de gymnase, écrit un scénario sous forme de monologue ou de conversation, et s'il le désire, dirige les mouvements des personnages et les plans de caméra, en cliquant sur des icônes à l'écran. En quelques secondes à peine, les serveurs de Xtranormal transforment cette information en une animation 3D complète.

Tout cela est entièrement gratuit et se fait à partir d'une fenêtre de navigateur web. Les animations créées peuvent être partagées sur le site de Xtranormal ou ailleurs, sur YouTube ou Facebook. Un logiciel qui s'installe sur un micro-ordinateur est en développement pour le printemps prochain. Entre-temps, d'autres environnements de plus haute qualité seront mis en vente. Ceux-là seront vendus aux gens qui désirent réaliser des animations à des fins promotionnelles, éducatives ou autres.

La pointe de l'iceberg

M. Deschênes ne s'en cache pas: dans le contexte actuel, l'entreprise devra rentabiliser ses opérations rapidement. Xtranormal compte tirer profit de la visibilité obtenue depuis son lancement auprès des internautes et des blogueurs d'un peu partout dans le monde. «Nous avons actuellement plus de 6000 abonnés et il s'en ajoute 300 chaque jour, dit-il. Notre service est offert en 8 langues, mais on pourrait aller jusqu'à 45. On pense faire de l'insertion publicitaire dans les vidéos gratuites.»

Cette formule n'est que la pointe de l'iceberg, ajoute le directeur général, qui voit des occasions d'affaires du côté des entreprises. «On pourrait prendre contact avec de grandes marques qui cherchent à créer un univers virtuel. Par exemple, on peut créer des univers entiers aux couleurs d'une marque comme Nike.» Xtranormal travaille justement sur un tel projet avec Mattel, où des enfants sont invités à réaliser leur propre scénario d'animation mettant en vedette la fameuse poupée Barbie.

Jean-François Deschênes voit aussi du potentiel du côté de la formation continue et du télétravail. «Notre objectif est simple: démocratiser la réalisation de contenu vidéo», dit-il. Autrement dit, ce que le web 2.0 a fait pour tout le reste, Xtranormal compte le faire pour l'animation 3D.