Le portrait du plus vieux métier du monde a bien changé. Même le recrutement des prostituées ne se fait plus vraiment sur la place publique. Il se ferait de plus en plus sur Internet, estime Michel Dorais, professeur à l'École de service social et chercheur au Centre de recherche sur l'adaptation des jeunes et des familles à risque de l'Université Laval.

«Il y a 30 ans, même chez les mineurs, la prostitution de rue dominait. Maintenant, elle se fait par téléphone, via Internet, dans certains hôtels, certains bars, certains restos», explique-t-il.Par son caractère pernicieux, la prostitution des jeunes filles doit être camouflée par ceux qui l'orchestrent. Du coup, le recrutement doit lui aussi être très subtil. «Les gangs et les proxénètes profitent de toutes les occasions possibles pour faire du recrutement.» Et Internet est le vecteur par excellence pour le faire discrètement.

«C'est hélas un moyen en progression», annonce le chercheur. De plus, cette approche permet de ratisser plus large, de contacter des jeunes filles de divers milieux et sur un plus grand territoire.

Les sites déguisés

C'est principalement par l'entremise des sites d'agence de mannequins que les jeunes filles se font attraper, observe le chercheur. «Veux-tu être mannequin, es-tu une belle fille?», trouve-t-on comme questions dans ces pages Web.

Avec une réponse positive, le recruteur demande ensuite à la fille d'envoyer des photos où il pourra bien voir son corps. Quelques morceaux en moins, «le gars a sa photo et peut enfin commencer son chantage», illustre M. Dorais.

C'est pourquoi le chercheur encourage les parents à interdire la webcam et même Internet dans la chambre de leur enfant. «Parce que les filles se déshabillent, lance-t-il. Elles ne le font pas parce qu'elles sont naïves. Elles le font parce qu'elles rêvent d'être mannequin, parce qu'elles veulent se faire dire qu'elles sont belles», ajoute-t-il.

La vigilance de mise

Les autres sites à risque sont bien sûr les sites d'échanges, de rencontres. «Sur Internet, vous ne savez pas qui est au bout. Vous pouvez penser que vous parlez à une jeune fille de 15 ans comme vous. Puis finalement, c'est un gars de 35 ans. Il faut donc augmenter la vigilance», prévient-il.

Une surveillance parentale est de mise, certes. Mais, les policiers de la Ville de Québec et de la Sûreté du Québec mettent aussi l'épaule à la roue.

Sans dévoiler l'effectifs attelé à la tâche, la sergente-détective Nathalie Thériault a admis qu'une division de la police de Québec se penchait sur la question du recrutement dans le cyberespace.