Avec l'essor d'internet, le trafic de drogues sur la toile a bondi ces dernières années, s'avérant bien plus dangereux que le trafic traditionnel, et plus difficile à contrôler, selon des experts réunis à Stockholm.

«Acheter de la drogue sur internet, c'est très simple: il suffit d'un internet café, d'une carte de crédit et le tour est joué», explique Daniel Altmeyer, officier d'Interpol spécialisé dans les drogues et les organisations criminelles, venu à Stockholm dans le cadre de la première édition du Forum international contre les drogues.

Impossible aujourd'hui de donner des chiffres, mais Daniel Altermeyer est formel: le trafic de drogues sur internet a augmenté en flèche ces dernières années.

«C'est une clientèle différente des consommateurs de drogue traditionnels», explique-t-il.

Les acheteurs sont essentiellement des jeunes, âgés de moins de 30 ans,"qui veulent tester de nouvelles choses, très à l'aise avec l'outil internet, où ils on accès à des forums, des sites, qui «de lien en lien», les amène vers une page web où ils peuvent aisément acheter des substances illicites, d'après le policier.

«Le côté anonyme rassure», indique de son côté Krister GÃfvert, inspecteur de police suédois, dont le pays est très en pointe en matière de lutte contre ce genre de trafic.

«Derrière son écran, on a l'impression de ne rien faire d'illégal. Il y a une distance entre nous et le site web. Sur internet, c'est un peu le trafic des cols-blancs, très loin de l'image de Pablo Escobar», ajoute sa collège Cecilia Fant.

Cet anonymat constitue pourtant un risque supplémentaire.

«On ne sait pas d'où vient la substance et c'est très dangereux. En plus, si l'on peut avoir des informations sur l'effet du produit, peu de personnes en possèdent sur la quantité à consommer, le dosage», poursuit Krister Gäfvert.

Les produits pharmaceutiques classés, normalement vendus sur ordonnance «et tout aussi dangereux que les drogues dures», représentent 90% des substances illicites vendues sur internet, selon Krister Gäfvert.

Sur la toile, de véritables pharmacies en ligne ont ainsi vu le jour.

«On y trouve une multitude de produits, des faux commentaires de spécialistes médicaux et des photos de médecins en blouse blanche pour donner une impression de sérieux et faire croire au client qu'il ne fait rien d'illégal», raconte le policier.

Drogues de synthèse (amphétamines et ecstasy par exemple), cocaïne, cannabis et héroïne sont également vendues sur internet.

Pour la police, ce trafic en ligne est très difficile à contrôler.

«Le délit ne se fait pas dans la machine, qui est juste un moyen de communication», souligne Daniel Altmeyer.

«Un site peut être hébergé en Suède, mais la drogue proviendra d'Amérique latine et sera envoyée par bateaux d'Afrique du Sud, avec des revendeurs dissimulés aux quatre coins de l'Europe. C'est un réseau mondial», explique-t-il.

D'autre part, tous les pays n'ont pas la même législation concernant les substances illicites. Ainsi, un produit interdit dans un pays peut être autorisé dans un autre.

M. Altmeyer prend ainsi l'exemple de la kétamine (anesthésiant médical, dont l'usage est souvent détourné pour ses effets hallucinogènes, ndlr) autorisée dans quelques pays dont l'Inde.

Si un site indien vend de la kétamine, même avec les meilleures lois en Suède, Allemagne ou aux Éats-Unis, j'aurai simplement besoin d'une carte de crédit et d'un café internet et ils m'enverront autant de kétamine par la poste que j'en aurai envie», conclut Daniel Altmeyer.