La ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie a annoncé mardi le blocage par les fournisseurs d'accès à internet (FAI) des sites pédophiles installés à l'étranger, un verrou supplémentaire pour «mieux sécuriser» les utilisateurs d'internet.

Si internet est «un immense espace de liberté, (il) est aussi vulnérable aux menaces, de la simple escroquerie à la propagande terroriste, en passant par la pédopornographie», a relevé la ministre, qui s'exprimait à l'ouverture des «Assises du numérique» à Paris, consacrées à la lutte contre la cybercriminalité.

Elle a souhaité que cet «espace soit celui de la confiance, de la sécurité et de la responsabilité».

Parce que cette lutte «doit reposer sur tous les acteurs concernés», a assuré la ministre, l'État et les FAI ont passé un accord pour que ces derniers «bloquent l'accès des internautes français aux sites pédopornographiques installés à l'étranger», comme cela se fait en Norvège.

Même si certains des FAI «voudraient commencer tout de suite», relevait-on mardi place Beauvau, cela ne s'appliquera qu'après une mesure législative insérée dans la future loi d'orientation et de programmation de sécurité intérieure (Lopsi), qui devrait être présentée à l'automne prochain.

«C'est l'État qui prendra la responsabilité d'informer les fournisseurs d'accès du contenu pédopornographique» des sites visés, a indiqué la ministre.

Ils le seront par la «plate-forme de signalement» de l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication (OCLCTIC, de la Direction centrale de la police judiciaire).

Les FAI garderont leur liberté quant au choix des logiciels correspondant à leurs installations, et seront indemnisés, comme le prévoit la jurisprudence du Conseil constitutionnel: «toute obligation imposée par l'État doit donner lieu à indemnité».

Tout en se défendant de créer «un big brother de l'internet», Michèle Alliot-Marie entend «protéger les enfants et leurs familles contre les pédophiles».

D'ores et déjà, les utilisateurs français de tels sites, lorsqu'ils sont identifiés, ont des comptes à rendre à la justice.

Quant aux sites étrangers contrevenant à d'autres lois françaises (terrorisme, apologie du racisme, etc.), ils font l'objet d'une saisie de l'autorité judiciaire et d'une transmission (via Europol et/ou Interpol) des informations dont disposent les enquêteurs.

En 2007, la plate-forme française a reçu 14 465 signalements, dont 308 ont été orientés vers des services d'enquête français et 1552 vers des services étrangers, via Interpol.

Cet aspect de la coopération internationale constitue l'une des «priorités» de la ministre, qui va «profiter de la présidence française de l'Union européenne» pour six mois, à partir du 1er juillet, pour «renforcer notre action commune (...) et la centralisation des informations».

Un forum d'experts policiers de 23 des 27 États membres vient de se réunir à Reims, pour préparer la création d'une «plate-forme européenne de signalement».

Installée au siège d'Europol à La Haye, elle centralisera les informations des plates-formes nationales, de sorte qu'»à partir de recoupements, une analyse commune favorise un résultat plus sûr et plus rapide», selon Gilles Leclair, inspecteur général de la police nationale, responsable opérationnel de la police judiciaire française.