Le mouvement islamiste Hamas qui contrôle la bande de Gaza depuis juin 2007 s'en était pris jusque-là aux vendeurs de drogues, aux consommateurs d'alcool et aux voleurs de voitures. Il s'est lancé à présent dans une nouvelle campagne: la guerre aux sites pornographiques.

«Depuis deux semaines, le gouvernement du Hamas a installé un filtre pour empêcher les gens d'accéder à ce genre de sites internet», explique Ali Sarayfi, le propriétaire d'un café dans le quartier des universités.

Comme tous les jours, des dizaines de jeunes, le nez collé à leur écran, surfent sur internet. Mais rien de pornographique à l'horizon.

Assis dans des box, les jeunes, la souris nerveuse, se divertissent avec des jeux en ligne comme «Counter Strike» (jeu de tirs), d'autres «chattent» ou vérifient leurs courriels sur le site social Facebook.

«Auparavant, tout le monde pouvait accéder à des sites au contenu sexuel. Certains venaient expressément dans les cafés pour ça, ajoute Ali. Aujourd'hui, c'est fini et c'est mieux comme ça».

Quand certains propriétaires de café tentaient d'empêcher l'accès à ces contenus, «ils étaient menacés. Ceux appartenant à des familles puissantes de Gaza leur disaient qu'ils allaient briser les vitres de leur magasin».

De nombreux cafés de la bande de Gaza ont à l'inverse fait l'objet d'attentats à la bombe, commis par des groupuscules extrémistes aux noms obscurs comme «Les épées de la vérité», qui se sont fait un devoir de lutter contre la pornographie.

Mi-mai, le ministère des Télécommunications du Hamas a signé un accord avec la société des Télécommunications palestinienne Paltel pour «protéger les fils du peuple palestinien, consolider la morale et les idéaux nationaux palestiniens», selon le texte du mémorandum obtenu par l'AFP.

Aux termes de cet accord, Paltel, l'unique fournisseur internet dans les territoires palestiniens pour les particuliers, filtre les connections à Gaza, empêchant d'accéder aux sites pornographiques.

«La société palestinienne souffre de ces sites immoraux. Nous avons donc pris cette décision pour protéger la morale et nous poursuivrons cette politique», affirme à l'AFP le ministre des Télécommunications du Hamas, Youssef al-Mansi.

«Après un an de discussion avec Paltel, nous avons enfin réussi à les bloquer», se félicite-t-il.

Mais les utilisateurs se plaignent car les connections sont devenues très lentes.

Le gouvernement du Hamas nous «a demandé de bloquer l'accès à ces sites pour tous les abonnés haut débit mais Paltel ne peut installer un filtre gérant plus de 5.000 abonnés», explique Charhabil al-Zaïm, membre de la direction de Paltel et conseiller juridique.

Une capacité dérisoire face au nombre d'abonnés ADSL dans la bande de Gaza qui s'élève, selon une source au sein de Paltel, à plus de 50.000. Quelque 1,5 millions de personnes au total peuplent ce petit territoire.

«Depuis deux semaines, internet est très lent. Les gens ne veulent pas attendre deux heures pour ouvrir une page», proteste Mohammed, un autre propriétaire d'un café internet près de l'Université islamique.

«C'est très bien de bloquer les sites pornographiques, mais ils ne savent pas comment le faire et détruisent notre business, ajoute le jeune homme. Cela pose problème aux étudiants, pour qui internet est indispensable, et aux entreprises».

Sans compter que de nombreux abonnés ont déjà trouvé la parade pour accéder aux pages désirées: un programme téléchargeable sur de nombreux sites permettant de contourner le filtre.