L'éditeur américain de logiciels Microsoft a déclaré jeudi qu'il ne voyait «pas de raison de relever son offre» de 44,6 milliards de dollars sur le groupe internet Yahoo! et qu'il annoncerait une décision la semaine prochaine si l'impasse se poursuivait au delà du week-end.

«Yahoo! continue à perdre du terrain dans le marché des recherches sur internet et sa rentabilité continue à décliner», a fait valoir Chris Liddell, le directeur financier de Microsoft, lors d'une conférence téléphonique de présentation des résultats trimestriels du groupe.

Microsoft a donné jusqu'au 26 avril aux dirigeants de Yahoo! pour accepter son offre, valorisant le groupe internet à 44,6 milliards de dollars.

«Si aucun progrès vers un accord n'est fait ce week-end, nous annoncerons des éléments nouveaux la semaine prochaine sur nos alternatives, qui incluent soit de s'adressser directement aux actionnaires, soit de nous retirer», a-t-il ajouté.

M. Liddell a accusé Yahoo! d'avoir «des attentes de valeurs irréalistes» et jugé que l'offre de Microsoft était déjà «extrêmement généreuse».

«Ce n'est pas parce que nous ne pouvons pas nous permettre de relever» l'offre mais «parce que nous n'avons aucune preuve que notre offre est sous-évaluée, nous voyons le contraire», a-t-il ajouté, en référence aux résultats trimestriels de Yahoo!, qui étaient conformes aux attentes avec un bénéfice stable hors éléments exceptionnels.

Trois mois après que Microsoft eut proposé de racheter Yahoo! pour 44,6 milliards de dollars, l'issue de l'offre reste toujours aussi incertaine.

Microsoft a proposé le 1er février de racheter Yahoo!, numéro 2 mondial de la publicité en ligne, afin de renforcer sa présence sur internet et de concurrencer Google, l'incontestable leader du secteur.

Il a offert 31 dollars par action, en titres et en numéraire, ce qui représentait une prime de 62% sur le cours de Bourse.

Les dirigeants de Yahoo! ont refusé cette offre à plusieurs reprises, affirmant que le prix proposé était trop bas, et ont passé ces dernières semaines à tenter de nouer des alliances avec d'autres partenaires.

Pour le PDG Jerry Yang, pionnier de l'internet qui a créé Yahoo! en 1994 comme un hobby d'étudiant, Microsoft --un mastodonte fondé en 1975 qui règne sur le milliard de «PC» de la planète avec son logiciel Windows-- est d'une autre génération et d'une autre philosophie.

Yahoo! a engagé des pourparlers avec le portail internet AOL (groupe Time Warner), numéro 3 de la publicité en ligne, pour l'instant sans aboutir.

Il a même testé un partenariat avec Google pour lui sous-traiter sa publicité, ce qui n'est pas sans poser de problèmes de concurrence.

Lassé de ne pas obtenir de réponse, le PDG de Microsoft Steve Ballmer a lancé le 5 avril un ultimatum de trois semaines à la direction de Yahoo!

Mercredi Yahoo!, dont la part de marché dans la publicité en ligne n'a cessé de décliner face à Google depuis deux ans, a annoncé un bénéfice courant stable, et répété que l'offre de Microsoft était trop basse. Microsoft lui a répondu le lendemain que si l'impasse devait durer au delà du week-end, il annoncerait une décision «la semaine prochaine».

Beaucoup d'analystes croient encore à un bluff et à un relèvement de prix de dernière minute. Les résultats trimestriels en baisse de Microsoft annoncés jeudi y semblent pourtant peu propices.

Les marchés craignent que Microsoft ne renonce et que le cours de Yahoo! reste scotché en dessous des 31 dollars offerts par Microsoft.

Pour les analystes, Yahoo! devrait évidemment accepter, car il perd chaque jour du terrain face à Google à cause d'une technologie moins efficace.

Selon le cabinet eMarketer, Google encaissera cette année plus de 30% des dépenses publicitaires en ligne contre 14% pour Yahoo!, qui perd encore 2 points et 6,7% pour Microsoft. Même s'il devait voir le jour, «MicroHoo» resterait donc loin derrière Google, avec 21% du marché.

«Yahoo! croît bien plus lentement que Google. S'il continue à reculer, il n'arrivera plus à le rattraper en restant indépendant. L'offre de Microsoft est la meilleure solution, il n'y en a visiblement pas d'autre. Microsoft pourrait renoncer si Yahoo! ne change pas vite d'avis», a résumé Carmi Levy, analyste chez AR Communications.

Avec ou sans Yahoo!, Microsoft veut s'imposer sur la publicité en ligne car son métier actuel, les logiciels payants -- son système d'exploitation Windows et sa suite Office (Word, Excel, PowerPoint) -- se font concurrencer par des logiciels en ligne gratuits financés par la publicité, comme ceux de Google.

Le PDG Steve Ballmer estime que Microsoft tirera à terme 25% de ses recettes de la publicité en ligne. Le groupe prédit que le marché mondial dans ce secteur doublera d'ici à 2010, à 80 milliards de dollars.