La ville de Rawdon a obtenu une injonction pour forcer six personnes à cesser d'écrire des propos haineux à propos de la mairesse et de son directeur général sur un forum de discussion. Fait exceptionnel, la Cour supérieure a aussi autorisé la saisie d'une «copie intégrale de la plateforme du site Rawdon-Qc.net» sur les ordinateurs personnels de trois personnes.

La ville de Rawdon a obtenu une injonction pour forcer six personnes à cesser d'écrire des propos haineux à propos de la mairesse et de son directeur général sur un forum de discussion. Fait exceptionnel, la Cour supérieure a aussi autorisé la saisie d'une «copie intégrale de la plateforme du site Rawdon-Qc.net» sur les ordinateurs personnels de trois personnes.

La saisie informatique, dite de type Anton Piller, a été autorisée par le juge Jean Guilbault sans que les défendeurs aient été mis au courant pour éviter que des données soient détruites. Les données ont été mises sous scellé et sont présentement entre les mains de la firme KPMG, jusqu'à ce que la Cour entende la cause en détail, en mai. Le site, sur lequel la mairesse Louise Major et le directeur général Jean Lacroix ont été comparés à Hitler, à Staline et aux SS, a depuis été mis hors ligne par son administrateur, Steve Solo.

Les avocats de Rawdon tenteront d'aller encore plus loin mardi, en réclamant à Toronto une saisie sur les serveurs d'Inverdigm, la compagnie ontarienne qui héberge le forum.

Le but de la manoeuvre est, entre autres, d'»obtenir l'identification des personnes participant au forum de discussion» sous neuf pseudonymes différents, lit-on dans l'ordonnance. Jusqu'à maintenant, les tribunaux canadiens ont toujours refusé de forcer les hébergeurs de sites web à fournir de telles données confidentielles qui se trouvent sur les sites de leurs clients. Pierre Trudel, professeur de droit des technologies de l'information à l'Université de Montréal, n'a pas hésité à qualifier de «très inquiétante» cette partie du recours qui sera entendue à Toronto. «La loi dit très clairement que les hébergeurs ne peuvent pas être tenus responsables de ce qui se passe sur un site, à moins qu'ils aient été préalablement prévenus que quelque chose d'illicite s'y déroule. Si la demande d'injonction était acceptée, ça montrerait qu'il y a des carences importantes en matière de protection de la vie privée.Bien sûr, sur l'internet, on peut trouver des propos très disgracieux, mais il y a d'autres types de recours que la censure préalable pour les faire cesser.»

L'étalage de propos haineux et orduriers aurait commencé sur Rawdon-Qc.net il y a quatre ans, après qu'un nouveau directeur général, M. Lacroix, eut été embauché. «Ça s'est mis à brasser après qu'il ait congédié à peu près 20 employés, dont certains qui avaient 30 ou 40 ans d'ancienneté. Tout le monde parlait de ça sur le site. Mais moi, je n'écrivais que sur les nids-de-poule et les trous dans les rues», a soutenu l'administrateur du site, Steve Solo, joint jeudi.

«Il y avait 143 personnes sur le forum, dont 12 actives. Ce n'est pas comme si c'était une grosse affaire. Moi je n'ai jamais rien dit de méchant. Mais ceux qui se sont fait raser en avaient long à dire», a ajouté l'administrateur, qui dit souffrir d'une dépression depuis que l'affaire s'est retrouvée devant les tribunaux.