Après une période de lèche-vitrine sur le Web, les Québécois ont triplé depuis deux ans leurs achats en ligne. Mais des détaillants locaux ratent le train... et de gros profits.

Après une période de lèche-vitrine sur le Web, les Québécois ont triplé depuis deux ans leurs achats en ligne. Mais des détaillants locaux ratent le train... et de gros profits.

C'est ce que craint le Cefrio (Centre francophone d'informatisation des organisations), qui a dévoilé hier son tout nouvel indice du commerce électronique au Québec, basé sur des sondages mensuels auprès de 1000 Québécois depuis mai dernier.

Ces premières données sont «tout un choc» pour Philippe Le Roux, président de l'agence Internet VDL2, qui y a travaillé avec Najoua Kooli, directrice de projet au Cefrio, et Éric Lacroix, directeur chez SOM Recherches et Sondages.

«Le train du commerce électronique a quitté la gare, mais personne ne le voit passer, déplore Philippe Le Roux.

Le Québec doit embarquer, car le train accélère. Tous les magasins ne vont pas fermer, mais il faut une stratégie incluant le Web». Le Québec accuse du retard sur le Web en Amérique du Nord, estime-t-il.

«L'ère du lèche-vitrine virtuel n'est plus», dit Liette D'Amours, porte-parole du Cefrio. «Le commerce électronique n'est plus marginal», renchérit Philippe Le Roux.

Selon Statistique Canada, 40% des achats en ligne profitaient à des chaînes de l'étranger, surtout américaines, en 2005.

En octobre dernier, les Québécois ont acheté pour 340 millions de dollars sur le Web, selon le Cefrio, donc 136 millions à l'étranger.

L'approche de Noël et la vigueur du dollar peuvent l'expliquer, estime Éric Lacroix. Par contre, pas moins d'un million de Québécois ont fait des achats en ligne de 266 millions en moyenne par mois en 2007, dit le Cefrio, comparativement à 88 millions en 2005, selon Statistique Canada.

Archambault doit affronter Amazon. L'impact du Web risque de s'apparenter à celui des mégacentres sur le centre-ville, ajoute Philippe Le Roux. Et que dire de l'impact sur les 500 000 employés du commerce de détail?

Malgré tout, le Web ne représente encore que 3% des ventes au détail totales de 7,4 milliards au Québec, note Najoua Kooli. Par contre, ce 3% s'approche de la marge de profit des détaillants (2% à 6%), souligne Philippe Le Roux.

Près de 18% des Québécois ont fait, en octobre dernier, des achats en ligne de 322$ en moyenne. Près de 130 000 Québécois ont dépensé plus de 1000$ sur le Web, chaque mois en 2007, selon le Cefrio.

Les ventes de Via Rail en ligne dépassent 50% du total, comparativement à 22% en 2005, ajoute Philippe Le Roux. Le Devoir trouve 10% de ses abonnés grâce à son édition électronique, dit-il.

Des hommes, jeunes, anglophones et diplômés universitaires font plus d'achats en ligne, selon le Cefrio. Les enfants influencent les achats familiaux, souligne Philippe Le Roux.

L'offre des chaînes du Québec sur le Web s'améliore, mais «il reste énormément de progrès à faire», selon M. Le Roux. «Les ados seront de gros acheteurs sur le Web», note Liette D'Amours.

L'indice du Cefrio vient corriger le manque de données sur les achats en ligne au Québec. Ce sera un outil très utile pour les détaillants, qui ne doivent pas manquer le bateau, ni «mettre tous leurs oeufs sur le Web», réplique Benoit Duguay, professeur à l'ESG-UQAM. Des PME n'en ont d'ailleurs pas les moyens: coût d'un site, formation des employés. Le Web ne remplacera jamais les achats en magasin, mais c'est un bon complément, dit-il.

À l'Association des hôteliers du Québec, 90% des membres sont maintenant reliés à un service de réservations, dont bonjourquebec.com, selon la directrice générale, Danielle Chayer. Gaston Lafleur, président du Conseil québécois du commerce de détail, n'a pu commenter hier.

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