La blogosphère marocaine, la plus active du Maghreb avec 30 000 adresses, s'est imposée, à l'instar des autres pays arabes, comme le meilleur moyen de débattre de sujets tabous en contournant la censure.

La blogosphère marocaine, la plus active du Maghreb avec 30 000 adresses, s'est imposée, à l'instar des autres pays arabes, comme le meilleur moyen de débattre de sujets tabous en contournant la censure.

«C'est une vraie révolution car chacun y va librement de son commentaire sur des sujets aussi sensibles que la monarchie, l'islam, le Sahara», explique Larbi.org.

Ce blogueur «vétéran», auteur de 443 billets ayant suscité 17 600 commentaires depuis octobre 2004, reçoit chaque jour 3500 visiteurs, qui discutent surtout de la constitution et la liberté de la presse.

«Les opinions sont très partagées et beaucoup défendent le statu quo», précise-t-il.

La «Blogoma» abrite aujourd'hui 30 000 blogues pour 4 millions d'internautes. «C'est peu par rapport aux 17 millions de blogues français mais bien plus que chez nos voisins», souligne Larbi.org.

Cinq fois plus qu'en Algérie, si l'on en croit DZblog.com, la plate-forme algérienne qui recense 5892 blogues, 2 millions de visiteurs et 7 millions de pages vues depuis janvier 2006. La Tunisie en compte environ un millier.

Etonnant, les blogueuses sont majoritaires au Maroc comme en... Arabie Saoudite où elle tiennent plus de 1000 blogues.

«La Blogoma, c'est un café convivial», explique Mehdi7, qui mêle sur son blogue chroniques légères et reportages sur la culture du cannabis, la prostitution ou les coulisses d'une visite royale.

Les blogosphères tunisienne et égyptienne se rapprochent plus du journalisme citoyen mais leur impact reste limité faute d'accès au net: moins d'un million de Tunisiens «surfent», et un Egyptien sur 10 est connecté.

Wael Abbas, un Egyptien de 33 ans, premier blogueur lauréat du prix du Centre International des Journalistes (CIJ), a conduit en novembre à la condamnation à trois ans de prison de deux policiers tortionnaires.

Moins chanceux, Karim Amer, 22 ans, a été condamné début 2007 à 4 ans de détention pour avoir critiqué, sur son blog Al Azhar, le président Hosni Moubarak et l'islam.

En mars 2005, un blogueur tunisien, Zouhair Yahyaoui, est décédé en prison où il purgeait une peine de 2 ans pour «diffusion de fausses nouvelles» sur les atteintes aux droits de l'Homme.

«Le Maroc est un pays où il fait encore bon bloguer», reconnaît Mehdi7, qui note qu'aucun blogueur n'y a encore été inquiété.

Mais dans la région, le bilan n'est pas brillant. Sur les 17 pays pointés sur «l'Access Denied Map» de l'ONG Global Voices Advocacy, qui lutte contre la censure sur internet, 7 sont arabes.

En mai, Rabat avait bloqué pendant six jours l'accès à Youtube où circulaient des vidéos insultant le roi. Même traitement en juin pour «Live Journal», une plate-forme étrangère de deux millions de blogues, qui hébergeait des blogues pro-Polisario.

«Les autorités se ridiculisent en croyant imposer la censure à des sites, car n'importe qui peut la contourner», assure Citoyen Hmida, doyen de la Blogoma.

En effet, la grande majorité des blogosphères arabes fait preuve d'indépendance et de liberté de ton. Ainsi à Bahreïn, des blogueurs ont soutenu trois animateurs de forums internet arrêtés en 2005, affichant régulièrement le lieu et l'heure des manifestations de soutien.

«Certains courants politiques ont essayé d'infilter la Blogoma mais elle a une forte capacité d'auto-préservation», assure Othmane Boummalif, consultant web au Maroc.

Le gros des blogues maghrébins et moyen-orientaux sont en arabe, en anglais, en français et dans des dialectes, retranscrits phonétiquement dans différents alphabets. Quelle que soit la langue, un genre y domine: le journal intime.