«Je suis la fille de 13 ans de Pittsburgh qui a été attirée par un prédateur sur internet, emmenée au loin et transformée en esclave»: le témoignage d'Alicia Kozakiewicz devant des parlementaires américains illustre la réalité sordide de la pédophilie sur internet.

«Je suis la fille de 13 ans de Pittsburgh qui a été attirée par un prédateur sur internet, emmenée au loin et transformée en esclave»: le témoignage d'Alicia Kozakiewicz devant des parlementaires américains illustre la réalité sordide de la pédophilie sur internet.

«Mais j'ai été sauvée, et je parle aujourd'hui au nom de toutes ces jeunes filles qui ne seront jamais entendues», poursuit l'étudiante en psychologie, aujourd'hui âgée de 19 ans, au cours d'une audition au Congrès consacrée à la lutte contre les prédateurs qui utilisent le net pour tromper et attirer de jeunes victimes.

Alicia, qui était entendue mercredi, a raconté comment, alors qu'elle était une adolescente qui souffrait d'ennui, elle est devenue amie d'une «belle fille rousse» sur un site de socialisation en ligne.

«Elle n'ignorait rien de moi. Nous partagions nos secrets, des photos de l'école... mais malheureusement Christine était un leurre: Christine était en fait un adulte pervers nommé John».

Alicia a été kidnappée le jour de l'an 2002 dans la maison de ses parents en Pennsylvanie par son «amie» d'internet. Elle a été emmenée en Virginie, où elle a été soumise à de terribles abus sexuels.

«Chaque centimètre de mon corps de 45 kilos a été violé», dit-elle posément lors de l'audition, dans un témoignage qu'elle a soigneusement préparé.

Trois jours après sa disparition, des agents du FBI (police fédérale) et d'une unité de la police de Pennsylvanie spécialisée dans les crimes contre les enfants l'ont retrouvée et libérée, grâce à l'instrument qui avait servi à l'enlever: internet.

Selon l'agent spécial Flint Waters, qui travaille dans le Wyoming (ouest) pour le bureau d'enquêtes criminelles du ministère de la Justice, internet a permis aux pédophiles de former un cercle regroupant «peut-être des millions de personnes dans le monde».

«Ils forment une économie en ligne qui fait du troc mettant en jeu des vies d'enfants: le produit qu'il recherchent, des images pédophiles, ne peut être fabriqué qu'à partir d'agressions sexuelles contre des enfants», explique l'agent Waters, qui a permis l'arrestation d'au moins un prédateur sexuel en se faisant passer pour une adolescente sur internet.

«Pister ces criminels sur internet est le meilleur moyen à notre disposition pour sauver les enfants», insiste-t-il.

Les fournisseurs d'accès comme Yahoo -- qui a été utilisé pour retrouver l'agresseur d'Alicia -- ou AOL se sont engagés à coopérer avec les agences fédérales dans le combat contre l'exploitation des enfants.

La loi américaine les oblige à signaler aux autorités tout trafic de pornographie infantile sur leurs réseaux, sous peine de pénalités d'au moins 100 000 dollars par jour.

Dans son témoignage, Grier Weeks, directeur de l'Association nationale de protection de l'enfance américaine, a estimé que «des centaines de milliers d'individus aux États-Unis sont actifs dans la pornographie enfantine».

«S'il y avait des centaines de milliers de braqueurs de banques dans la nature, nous déclarerions l'état d'urgence. Mais ce ne sont que des enfants», a-t-il souligné avec amertume.

«Nous sommes débordés. Nous manquons de financements. Nous sommes noyés dans une vague de tragédies et nous ne disposons pas des ressources suffisantes pour sauver ces enfants», a plaidé de son côté l'agent Flint Waters.

Mais c'est à Alicia Kozakiewicz qu'est revenue la conclusion de cette audition: «L'ogre est bien réel et il vit sur internet. Il est dans mon ordinateur, dans le vôtre, et pendant que nous sommes ici, il est à la maison avec vos enfants», a-t-elle averti.