On en parle depuis quelques années déjà, mais la télé sur internet, ou TVIP, n'a toujours pas décollé au Canada. Tandis que des entreprises étrangères en profitent pour accroître la productivité de leurs employés, ou pour faire de la prospection de la clientèle, ici, on piétine encore.

On en parle depuis quelques années déjà, mais la télé sur internet, ou TVIP, n'a toujours pas décollé au Canada. Tandis que des entreprises étrangères en profitent pour accroître la productivité de leurs employés, ou pour faire de la prospection de la clientèle, ici, on piétine encore.

Au Québec, l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec (APFTQ), se demande encore comment produire du contenu pour cette nouvelle plateforme. L'Union des artistes, de son côté, n'a toujours pas trouvé de formule convenable afin de gérer les droits d'auteur et la rémunération en fonction de ce nouveau média. Face à cela, l'industrie tape du pied, ou va carrément voir ailleurs.

«Il faut que le Québec se réveille, sinon on va finir pas ne retrouver que du contenu étranger sur internet», résume Guy-Charles Pelletier, président de Pecunia, entreprise montréalaise qui fournit des services de diffusion par internet à plus d'une soixantaine de clients dans le monde. «Parce qu'avec la télé sur internet, il n'y a pas de notion de territoire», ajoute-t-il. «Le CRTC ne pourra pas légiférer sur la TVIP, et s'il le fait, il va tout simplement tuer cette industrie au Canada.»

Une industrie qui est loin d'être inexistante, au contraire. Pecunia, par exemple, travaille déjà à intégrer des plateformes comme les consoles de jeu vidéo Xbox et PlayStation, ainsi que l'Apple TV, à sa propre technologie. Elle a comme partenaires des entreprises d'envergure, comme Microsoft, et son marché est international. «On met l'accent sur l'international parce qu'ici, de toute façon, il n'y a pas de marché», dit M. Pelletier.

L'interaction, la clé?

André H. Caron est professeur en communication à l'Université de Montréal et directeur du Centre de recherche interdisciplinaire sur les technologies émergentes (CITÉ). L'hiver dernier, son groupe d'étude a prêté des baladeurs vidéo à une centaine d'étudiants, afin de vérifier comment ce nouveau média allait affecter leur vie.

Résultat: pas tant que ça. «Ils en font une consommation minimale, très prudente», dit-il. «Ça va prendre du temps avant de répondre à leurs besoins. À ce niveau, la télévision par internet est à un stade préhistorique, pense-t-il. Elle a encore de nombreux défis à relever.»

Le président de Pecunia est partiellement d'accord. En fait, il pense avoir trouvé une partie de la solution: l'interaction. Son entreprise est d'ailleurs l'une des rares dans le monde à diffuser en direct sur internet, tout en fournissant une interaction instantanée avec les internautes.

M. Pelletier cite l'exemple de l'émission R-Force, sur Vrak.tv, pour laquelle il a produit une série d'émissions en ligne. «Sur internet, la diffusion en direct marche beaucoup mieux que la vidéo sur demande à cause de la possibilité d'interagir directement, par messagerie texte, vocale ou vidéo.»

Un outil de productivité

C'est une analyse qui est plutôt juste, puisqu'elle fait écho à un phénomène qui gagne en popularité en ce moment au sein des grandes entreprises: celui des webinaires et des conférences virtuelles. Le groupe Deloitte, par exemple, offre de la formation en ligne à ses employés à partir d'internet. C'est une façon de réduire les frais de transport sans couper dans le niveau de formation.

Mieux encore, des sociétés font livrer un repas à des clients potentiels, afin qu'ils passent leur heure de lunch devant leur ordinateur, à interagir dans une conférence virtuelle durant laquelle ils peuvent poser des questions au conférencier par webcaméra interposée.

Ça facilite d'autant le suivi: si la personne a écouté la conférence jusqu'au bout, c'est qu'elle est intéressée à votre produit ou service. Ce sera bien plus facile de faire une vente dans ce cas-là.

Même chose pour les internautes-téléspectateurs: avec les outils de mesure adéquats, ils sont bien plus faciles à cibler que les télé- spectateurs traditionnels. Sauf que pour en arriver là, il faudra commencer par produire du contenu original pour la TVIP, ce qui fait défaut à la belle province.