Les ambitieux fondateurs du moteur de recherche Google ont mis sur pied une organisation charitable dotée d'un fonds de près de 1 milliard US et destinée à financer des activités de lutte contre la pauvreté, les maladies et le réchauffement planétaire.

Les ambitieux fondateurs du moteur de recherche Google ont mis sur pied une organisation charitable dotée d'un fonds de près de 1 milliard US et destinée à financer des activités de lutte contre la pauvreté, les maladies et le réchauffement planétaire.

Mais contrairement à la plupart des organismes philanthropiques, celui-ci sera à but lucratif, de sorte qu'il pourra financer de jeunes entreprises, constituer des partenariats avec des investisseurs de capitaux à risque et même faire du lobby auprès du Congrès. Et payer des impôts.

L'un de ses premiers projets risque d'attirer l'attention. Selon des gens bien au courant des intentions de Google.org, la nouvelle organisation entend investir dans la mise au point d'un moteur de véhicule à efficacité énergétique accrue et alimenté à l'éthanol, à l'essence et à l'électricité.

L'organisme a déjà pris contact avec des chercheurs et des constructeurs de voitures. Il a convenu d'acheter un petit parc de véhicules dont les moteurs seront convertis de façon à ce que leur consommation excède 100 milles (166 kilomètres) au gallon. L'objectif du projet est de réduire la dépendance face au pétrole et d'alléger les effets du réchauffement planétaire.

La stucture même de Google.org et ses ambitions suscitent le scepticisme de plusieurs. L'organisme a l'air d'un petit lance-pierre face à l'artillerie des organisations charitables fondées par de vieux routiers des affaires. Son fonds est modeste quand on le compare aux quelques dizaines de milliards de la Fondation Bill et Melinda Gates, à laquelle Warren Buffett, fondateur de Berkshire Hathaway, s'est engagé à verser 3 milliards US par année.

Les créateurs de Google investissent dans la philanthropie alors que l'entreprise est encore toute jeune. Bill Gates a attendu que Microsoft ait ses 25 ans bien sonnés avant de mettre sur pied une fondation exempte de charges fiscales et sans lien avec son entreprise.

En optant pour un statut d'organisme à but lucratif, Google.org devra acquitter tout impôt sur les bénéfices d'affaires, de même que sur les profits générés par la vente d'actions de Google destinée à financer les projets de l'organisation. Les actionnaires reprocheront peut-être à Google.org de ne pas dévoiler le contenu de ses déclarations de revenus, lesquelles seront conservées confidentiellement avec les déclarations de revenus de la maison mère Google.

Les fondateurs de Google, Larry Page et Sergey Brin, croient que le statut d'organisme à but lucratif de leur fondation élargira ses possibilités. Elle pourra ainsi monter une entreprise de voitures converties, la financer en partenariat avec des investisseurs de capitaux à risque et même presser le Congrès d'adopter une loi accordant une exemption fiscale aux acheteurs de ses véhicules.

Le directeur exécutif que les deux associés ont embauché, le Dr Larry Brilliant, est aussi iconoclaste que la filiale philanthropique de Google. Ce brillant médecin de 61 ans a étudié auprès d'un gourou hindou dans un monastère de l'Himalaya et a été dans les affaires à Silicon Valley. Le Dr Brilliant travaille depuis long temps sur la mise au point d'un système de détection rapide des épidémies et entend associer Google.org à la poursuite de son projet.

Selon lui, les fondations d'entreprise, telles qu'elles ont toujours été constituées, ressemblent à un musicien qui serait confiné aux notes du registre aigu d'un piano. « Google.org pourra jouer toutes les notes du clavier, dit le Dr Brilliant. Elle peut lancer des entreprises, créer des industries, payer des consultants, faire du lobby, donner de l'argent à des individus et empocher des profits. »

Bien qu'il refuse de discuter de façon détaillée du projet de voiture hybride, il dit espérer qu'un tel projet s'avère rentable. « Mais si ce n'est pas le cas, nous ne nous en ferons pas », dit-il.

D'aucuns, parmi les avocats fiscalistes et autres spécialistes de la philanthropie, sont plutôt sceptiques. Ils se demandent si, advenant un ralentissement des activités, les administrateurs de Google ne pourraient pas être tentés d'utiliser une partie des fonds de Google.org.

Le seul élément traditionnel de Google.org est la fondation sans but lucratif Google, dotée d'un fonds de 90 millions US et tenue par la loi sur le revenu de divulguer ses états financiers.

Toutes les dépenses de Google.org, dit le Dr Brilliant, seront conformes à sa mission et il n'y aura pas de « détournement ».

Google n'existait que depuis six ans quand, avant l'inscription de la compagnie en Bourse en août 2004, MM. Page et Brin ont prévenu les investisseurs intéressés qu'ils entendaient réserver 1 % des actions et 1 % des bénéfices pour une oeuvre philanthropique. Fin 2004, Google.org était déjà constitué.

La compagnie a fait savoir qu'elle prévoit investir cet argent au cours des 20 prochaines années. Le conseil d'administration de Google a récemment approuvé un rythme de décaissement plus rapide que prévu, soit 175 millions US au cours des deux prochaines années.

« Les pauvres ne peuvent attendre, dit le Dr Brilliant. Les mourants n'ont rien à attendre d'un plan sur 20 ans. Ce n'est pas notre façon de travailler. »