C'est un peu comme si Apple offrait gratuitement les services de son assistant Siri à l'Accueil Bonneau.

La plateforme montréalaise de « service à la clientèle multicanal » Smooch a été utilisée depuis 2015 par 4500 entreprises, dont de grandes marques comme IBM, L'Oréal et U-Haul. Fait moins connu, elle a aussi été offerte gratuitement à une douzaine d'organismes de la métropole, notamment ACCM (le sigle d'AIDS Community Care Montreal, moins utilisé), qui offre aux adolescents un service anonyme en ligne sur la sexualité, SextEd.

Comme les grandes entreprises, SextEd utilise Smooch pour répondre aux requêtes des « clients » quel que soit le mode de communication utilisé, des textos à Messenger. Ce sont des bénévoles de l'organisme anglophone qui traitent les questions, environ un millier par année, qui atterrissent sur le même écran, quel que soit le canal utilisé.

Comme chez les scouts

L'apport essentiel de Smooch dans ce projet, c'est d'assurer la confidentialité des échanges avec sa plateforme sécurisée, explique le chef de la technologie de l'entreprise, Mike Gozzo. « On fournit la technologie, on s'assure que les gens qui ont besoin de soutien puissent communiquer sans crainte leurs besoins et leurs craintes à quelqu'un qui va les écouter. » Pour y arriver, la plateforme donne un surnom particulier à l'adolescent qui contacte SextEd : tout ce que voit le bénévole, c'est un nom d'animal suivi d'un adjectif amusant, comme chez les scouts.

« Le bénévole ne voit jamais le numéro de téléphone de la personne de l'autre côté. »

À l'organisme ACCM, on compte étendre l'utilisation de Smooch à un autre service d'écoute multicanal qui sera offert aux personnes atteintes du VIH.

« La confidentialité est importante dans ce contexte, bien des gens atteints ne se sentent pas à l'aise de parler de drogue ou de sexualité avec leur médecin », explique Andreas Mertens, responsable du service SextEd.

Impact au Texas

Chez Smooch, une toute jeune entreprise de 55 employés, on se montre particulièrement fier de l'utilisation « humanitaire » de la plateforme. « Elle est assez facile à utiliser, alors on peut l'offrir gratuitement à des organismes », dit le chef de la technologie, qui précise que chaque collaboration de ce type est évaluée « au mérite ».

Une des causes les plus touchantes auxquelles Smooch est associée, explique-t-il, est celle des jeunes filles au Texas qui recourent à une ligne d'information sur l'avortement et la contraception, Jane's Due Process. Dans 70 % des cas, il s'agit d'adolescentes issues de l'immigration dont les parents, parfois illégaux sur le sol américain, ne veulent pas autoriser l'avortement. « C'est probablement notre plus gros succès en termes d'impact, dit M. Gozzo. L'avortement est une question très controversée au Texas, mais ce n'est pas seulement une question religieuse : les parents immigrants illégaux ont peur d'aller voir les autorités. » Jane's Due Process, précise-t-il, recourt aux services d'avocats bénévoles qui tentent d'obtenir des mandats pour ces jeunes filles.