Un centre de recherche sur l'intelligence artificielle ouvre mercredi ses portes à l'université de Cambridge avec l'ambition d'accompagner le développement de cette discipline scientifique dont les applications potentielles inspirent autant de craintes que d'espoirs pour l'avenir de l'humanité.

«L'essor d'une puissante intelligence artificielle constituera soit la meilleure, soit la pire chose jamais survenue à l'humanité. Nous ne savons pas encore. Les travaux de recherche que mènera ce centre seront cruciaux pour le futur de la civilisation», résume l'astrophysicien britannique Stephen Hawking.

Séparer le bon grain de l'ivraie, faire en sorte que l'intelligence artificielle profite à l'humanité, c'est en effet l'objectif que s'est fixé le «Centre Leverhulme sur le futur de l'intelligence» (CFI), financé par une subvention de 10 millions de livres (11,2 millions d'euros) de la fondation Leverhulme Trust.

Fruit d'une collaboration entre les universités d'Oxford, de Cambridge, de l'Imperial College de Londres et de Berkeley (Californie), le CFI réunit des scientifiques de multiples disciplines qui travailleront avec des responsables politiques et du monde de l'entreprise sur des thématiques variées, allant de la régulation des armes autonomes aux implications de l'IA pour la démocratie.

«L'intelligence artificielle est un domaine incroyablement passionnant. Ses applications pratiques peuvent nous aider à répondre à des problèmes sociaux majeurs, tout en facilitant notre vie de tous les jours», remarque Margaret Boden, professeure en sciences cognitives, consultante au CFI.

Cette technologie a également permis des avancées «dans les sciences de la vie et de l'esprit», ajoute-t-elle.

Mal utilisée, l'IA peut en revanche «constituer un grave danger», ajoute-t-elle, alors que depuis que l'informatique existe, les craintes de voir les machines s'affranchir de l'homme, si ce n'est l'éliminer, ont alimenté moult films et romans, pour ne citer que «2001: Odyssée de l'espace» et son ordinateur assassin.

Libération ou destruction?

Au-delà des scénarios catastrophes, le développement de l'intelligence artificielle, qui permettra à terme de construire des robots capables d'exécuter quasiment toutes les tâches humaines, menace également directement des millions d'emplois.

Bref, l'intelligence artificielle, qui a déjà battu l'homme aux échecs ou au jeu de go, finira-t-elle par mettre sur la touche son propre créateur?

«Il ne faut pas partir du principe que l'IA va nous remplacer, mais imaginer qu'elle va nous améliorer. Nous serons capables de prendre de meilleures décisions sur la base d'informations plus pertinentes», répond le Pr Stephen Cave, le directeur du centre.

«L'IA nous aidera à apprendre sur nous-mêmes et notre environnement et pourrait se révéler libératrice», dit-il à l'AFP, en précisant, lui aussi: «À condition qu'elle soit gérée correctement.»

C'est pourquoi l'éthique sera l'un des champs de recherche du CFI. «Il s'agit de faire en sorte que les systèmes fonctionnant avec une IA poursuivent des objectifs alignés sur les valeurs humaines», pour que les ordinateurs n'évoluent pas spontanément vers des «directions nouvelles et malvenues», explique le chercheur.

«Avant que nous ne déléguions à l'IA des décisions dans des secteurs importants, nous devrons être certains que les systèmes intelligents à qui nous les déléguons soient suffisamment dignes de confiance», souligne-t-il.

L'ouverture du centre de recherche intervient au moment où les plus grands groupes internationaux rivalisent d'ambitions en matière d'intelligence artificielle. Google l'a intégrée dans son nouveau téléphone, Apple et Microsoft proposent des assistants personnels, et Sony ou Volkswagen ont également investi dans le développement de l'IA.