Après le bois, l'aluminium et le graphite, la raquette de tennis passe en mode connecté: une version «intelligente» à l'image des téléphones intelligents, déjà commercialisée aux États-Unis, va faire son entrée sur le marché européen courant mai.

À l'aide de capteurs situés à l'intérieur de son manche, le produit, identique à un modèle traditionnel, fonctionne comme un robot analysant la puissance de frappe, la zone d'impact de la balle sur le tamis, les types de coups réalisés, mais aussi les effets, le temps de jeu, la régularité, l'endurance...

«Aujourd'hui, c'est comme si Star Wars arrivait dans le tennis», se réjouit Eric Babolat, le PDG de l'entreprise française éponyme, conceptrice de cette «raquette intelligente».

Le patron de cette société, l'une des plus anciennes spécialisées dans le tennis, est persuadé que «d'ici dix ans, tous les modèles seront connectés».

La Babolat Play est en fait la version évoluée d'un modèle déjà existant, celui utilisé par la vedette chinoise Li Na. À terme, il est question d'équiper toute la gamme de la marque.

Seule différence visible avec le modèle traditionnel: sa couleur, et une diode bleue située à l'extrémité du manche qui clignote lorsqu'on l'allume.

Nadal et Tsonga testeurs 

Rechargeable et compatible avec ordinateurs, téléphones intelligents et autres tablettes via un câble USB ou en mode bluetooth, elle fonctionne avec une application qui vous dira, par exemple, combien de balles vous avez frappées à plat, combien étaient liftées, slicées.

La Babolat Play a aussi une vocation «sociale», les joueurs ayant la possibilité de comparer leur niveau en ligne et de se lancer des défis.

«Elle peut être utile pour un amateur, mais aussi pour une vedette comme Rafael Nadal. Aujourd'hui, Rafa peut avoir des informations grâce aux caméras aux bords du court. Mais ce qui se passe lorsque la balle vient frapper le tamis restait jusque-là un mystère», plaide Thomas Otton, directeur de la communication chez Babolat.

Le N.1 mondial espagnol et le Français Jo-Wilfried Tsonga avaient testé un prototype il y a deux ans lors d'une démonstration. Eric Babolat attend maintenant qu'une vedette l'utilise en compétition. Car, depuis le 1er janvier, la raquette est homologuée sur les circuits ATP et WTA.

Sony associé avec Yonex 

S'il comprend l'intérêt pour les amateurs, Jean-Christophe Piffaut, ancien conservateur du musée Roland-Garros et auteur d'un ouvrage sur le tennis, est perplexe quant à l'utilité de cette raquette pour les professionnels.

«Les joueurs de haut niveau ont un entraîneur et disposent de pas mal d'informations grâce à la vidéo. Je pense qu'elle ne fera que confirmer ce qu'ils savent déjà», estime-t-il.

Eric Winogradsky, responsable du haut niveau masculin à la Fédération française de tennis (FFT), est lui convaincu du contraire. «Le croisement de données est intéressant. Il faut être lucide: l'avenir, c'est ça. Plein d'autres sports s'y mettent. Pourquoi le nôtre serait-il épargné par les évolutions technologiques?», affirme l'ancien entraîneur de Tsonga et Gaël Monfils.

Vendue au tarif de 399 euros (plus de 615 $), environ le double du modèle classique, la Babolat Play ne devrait pas être très longtemps la seule connectée.

La firme nippone Sony a de son côté mis au point un capteur qui doit s'adapter sur tous les types de raquettes, avec de premiers modèles lancés sur le marché japonais en principe courant mai via un partenariat avec le fabricant Yonex.

Si la mayonnaise prend, la bataille entre les marques se fera ensuite sur les évolutions apportées à la raquette intelligente. Eric Babolat imagine déjà des conseils d'entraîneur fournis dans l'application. À quand la version parlante et munie d'une caméra embarquée?