L'achat par Facebook de la populaire application mobile Instagram a fait couler beaucoup d'encre, la semaine dernière.

Malgré le montant élevé de la transaction, son impact sur la valorisation des jeunes pousses technos pourrait toutefois être plus marginal qu'on le pense, sauf pour l'entreprise montréalaise Factyle, qui suit de près le chemin tracé par Instagram.

La société de capital-risque Real Ventures, qui a investi des centaines de milliers de dollars dans Factyle, juge la nouvelle d'Instagram excellente. Tout ce que fait Factyle depuis deux mois rappelle la démarche de la petite équipe de concepteurs californiens qui a permis à Instagram de passer de zéro à 35 millions d'utilisateurs en à peine un an et demi.

Sauf que dans le cas de Factyle, et de son application Cinemagram, ça va plus vite encore. «Cinemagram est sur une lancée similaire à celle d'Instagram à ses débuts, mais son taux d'adoption semble s'accélérer plus rapidement», constate Jean-Sébastien Cournoyer, le partenaire de Real Ventures qui a investi dans Factyle.

Lancée au début février, l'application exclusive à l'iPhone, d'Apple, a été téléchargée un million de fois. Chaque jour, ses utilisateurs créent en moyenne 100 000 «cinémagrammes», des photos animées que l'application réalise à partir d'une courte séquence vidéo captée par l'utilisateur. Bien maîtrisé, le résultat est saisissant.

Le potentiel de Cinemagram l'est tout autant, même s'il reste quelques défis importants à relever. Temo Chalasani et Marc Provost, ses créateurs, doivent trouver une façon de partager les photos créées à l'aide de leur application. D'un format inusité, elles ne s'affichent pas normalement sur des sites comme Facebook. En revanche, les utilisateurs peuvent partager leurs photos directement dans Cinemagram.

Et Factyle, comme Instagram, ne tire pas de revenus de son application. «Ce que l'achat d'Instagram par Facebook nous dit, c'est que cette étape-là n'est pas importante à ce stade-ci du développement. Ce qu'il faut, c'est créer le plus grand bassin d'utilisateurs possible. On verra ensuite comment faire des sous», explique M. Cournoyer.

Le spectre de la bulle techno

Dans le petit monde des nouvelles technologies, la profitabilité est un concept à échéance variable. Dès l'annonce de la transaction Facebook-Instagram, plusieurs ont cru à un retour de la bulle techno du début des années 2000. Un milliard de dollars US, pour une société ne générant aucun revenu, c'est cher payé, estiment plusieurs observateurs.

«C'est plus un effet direct de l'entrée en Bourse de Facebook», croit Chris Arsenault, d'iNovia Capital, à Montréal. «Estimant sa valeur à 100 milliards de dollars, Facebook va redonner le goût aux grosses sociétés ayant beaucoup d'argent en poche de magasiner pour de nouvelles pousses prometteuses.»

Un goût que Mark Zuckerberg, le fondateur de Facebook, possède manifestement. Cela dit, son entreprise n'a déboursé que 1% de sa valeur théorique sur Instagram, une application photo qui pourrait devenir le plus important réseau social du web mobile, si sa croissance effrénée s'étire sur quelques années encore.

«Un milliard de dollars pour une société en démarrage sans revenus, c'est quand même fou! Les marchés seront probablement plus alertes pour des sociétés engrangeant les profits, mais espérons qu'ils n'évalueront pas trop souvent à la hausse de jeunes sociétés générant peu ou pas de revenus», prévient M. Arsenault.

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