C'est peut-être lié à l'Halloween, mais il semble que Steve Jobs puisse alimenter les rumeurs, même de l'outre-tombe. Il n'aura fallu qu'une brève citation posthume du cofondateur d'Apple sur le sujet pour remettre un éventuel téléviseur Apple à l'ordre du jour des nouvelles technologies. De quoi faire sourciller les analystes qui ont encore frais en mémoire les tentatives ratées de Hewlett-Packard, Google et Microsoft...

Si Apple met en marché une iTV l'automne prochain, comme l'indique la rumeur, le fabricant «ne connaîtra pas le succès espéré», croit Gene Munster, analyste de la firme américaine Piper Jaffray. Selon lui, Apple compte combiner à un téléviseur typique des technologies qu'on retrouve déjà sur ses produits mobiles, comme le service de stockage de fichiers iCloud et la boutique virtuelle iTunes.

Des fournisseurs asiatiques en auraient même déjà assemblé les premiers exemplaires, en vue d'une commercialisation au courant de l'automne 2012. En y ajoutant la touche magique d'Apple côté design, le produit final pourrait être attrayant, mais ça pourrait ne pas suffire, estime également Tim Bajarin, président de la firme d'analyse Creative Strategies.

«Je vois très bien l'intégration de la reconnaissance vocale Siri à ce téléviseur. Pour remplacer la télécommande, il suffirait de lui demander de «trouver le canal Évasion», ou «à quelle heure joue Tout le monde en parle? Tu peux l'enregistrer?», mais Apple a probablement un autre as dans sa manche, car le succès dans ce créneau est plus complexe. Il lui faudra notamment réunir sur un seul écran plusieurs sources différentes de contenu audiovisuel, et ce, de façon tout à fait transparente.»

Sur les traces de Microsoft, HP et Google

Dans sa biographie parue la semaine dernière, Jobs assure «avoir résolu» l'énigme télévisuelle, de la même façon que l'iPod a résolu l'énigme de la musique numérique il y a 10 ans. Cette fois-ci, par contre, Apple débarquerait dans un marché qui a résisté à des percées tentées par Microsoft et ses Media Centres du début des années 2000, puis à la Google TV, au cours des deux dernières années. Entre les deux, même HP s'y est essayée, sans plus de succès.

Qu'est-ce qui motiverait Apple à se lancer à son tour dans une telle aventure? «Il faut donner le bénéfice du doute à Jobs, qui affirme avoir trouvé la solution. Historiquement, Apple n'est pas reconnu pour être un pionnier, mais plutôt pour rendre les choses existantes plus simples et plus fiables. Ce sont en plein les ingrédients qu'il faudra pour régler le cas de la télévision», estime Amit Kaminer, analyste pour le Seaboard Group, à Toronto.

Selon lui, l'iPad est la clé: les millions de tablettes vendues par Apple lui fournissent des données précieuses sur les habitudes de consommation de contenu vidéo des consommateurs. «Plusieurs foyers visionnent déjà plus de contenu vidéo à partir de produits comme l'iPad et l'Apple TV que directement sur leur téléviseur. Il suffit qu'Apple combine cette expérience à une interface télévisuelle réussie, et qu'elle convainque les différents producteurs de contenu d'être présents, pour que le consommateur n'ait pas à faire le choix en quantité et qualité.»

Le défi est donc de taille. Les autres géants technologiques ont tous échoué par le passé. Apple risque le même sort, mais comme le succès qu'ont connus ses plus récents produits l'indique, ça ne signifie pas mission impossible pour autant.