Les livres et les magazines numériques ont connu un bond de popularité spectaculaire en 2010, la croissance de ce marché naissant prenant tout le monde par surprise. Les prévisions pour 2011: une croissance encore plus prononcée, surtout si les premières liseuses couleur voient le jour comme prévu. De quoi réjouir les éditeurs québécois, pour qui s'ouvrent de nouveaux marchés étrangers.

C'est du moins ce que prévoit Richard Maggiotto, président et fondateur de Zinio, un des plus importants services de distribution de magazines et de livres numériques dans le monde. Présente sur plusieurs appareils mobiles, la librairie virtuelle Zinio propose au-delà de 3000 publications, provenant de 650 éditeurs répartis un peu partout dans le monde, incluant le Québec.

«La croissance a été spectaculaire cette année: nos ventes ont bondi de 400% en 2010 et elles devraient augmenter plus rapidement encore en 2011», explique à La Presse Affaires l'homme d'affaires d'origine canadienne, établi à San Francisco depuis plus d'une dizaine d'années.

Bonne nouvelle pour les éditeurs, les ventes faites en numérique ne le sont pas toutes au détriment du papier. «Dans le magazine, la croissance varie selon les sujets: les titres technologiques sont plus populaires. Les titres plus rares en papier, ceux qui sont épuisés, notamment. Et de façon générale, les publications qui sont d'origine étrangère sont très populaires, ce qui crée un nouveau marché pour les éditeurs.»

Ainsi, sur Zinio, la publication canadienne Maclean's est très populaire en Europe, alors qu'à l'inverse, des publications françaises comme L'Équipe ou Le Point vendent beaucoup au Québec. «C'est la même chose pour les éditeurs québécois, qui peuvent ainsi espérer vendre en France et ailleurs dans la francophonie.»

Les tablettes sont la clé

C'est sans surprise que l'émergence des tablettes numériques comme l'iPad, d'Apple, est perçue comme étant la principale cause derrière cette croissance de l'édition numérique. Mais ce serait donner à Steve Jobs, PDG d'Apple, un peu trop de mérite, selon les analystes. Après tout, les tablettes multimédias ont un écran ACL éclairé de l'arrière, ce qui rend pénible la lecture prolongée de leur affichage, surtout si on se trouve en plein soleil.

C'est à des détaillants comme Amazon qu'on doit plutôt l'émergence de l'édition numérique. Amazon et son Kindle, dont les ventes ont plus que triplé en 2010, passant de 2,4 millions l'an dernier à environ 8 millions, cette année, selon des estimations faites par des analystes indépendants (Amazon ne divulgue pas les ventes de sa liseuse). C'est aussi 60% de plus que les 5 millions de ventes que des firmes comme Barclays Capital et Citigroup prévoyaient jusqu'ici.

Selon les projections, l'édition numérique n'attend que l'arrivée de liseuses dotées d'un écran couleur pour réellement prendre son envol. La valeur de ce marché se situe tout juste sous le milliard de dollars US cette année. Elle devrait toutefois tripler d'ici 2015, et pratiquement décupler d'ici 2018, selon des études publiées récemment par Forrester et le NPD Group.

Or, 2011 pourrait marquer la mise en marché de la première liseuse couleur. Le mois prochain, Qualcomm, un fabricant de composantes électroniques du secteur des télécommunications, devrait présenter au public son PocketBook Mirasol, une tablette dont l'affichage couleur ne requiert aucun éclairage. La mise en marché du PocketBook était initialement prévue pour cet automne.

Ce retard ne refroidit en rien les attentes des éditeurs ni du fondateur et principal dirigeant de Zinio. Au contraire. «Les lacunes de l'affichage des tablettes présentement en marché sont le principal frein à l'adoption du numérique dans notre marché. Les écrans couleur comme la technologie Mirasol régleront ce problème pour de bon.»