Nouveau tour de vis en prévision en Chine, où Pékin s'apprête à renforcer une loi exigeant des sociétés de téléphonie ou d'internet de dénoncer leurs clients qui discutent de secrets d'État, une mesure visant à transformer les entreprises du secteur en auxiliaires du vaste appareil sécuritaire chinois.

Le projet d'amendements à la loi sur la préservation des secrets d'État imposera de manière plus explicite aux opérateurs télécom et fournisseurs de services sur Internet d'aider la police et les organes de sécurité dans les enquêtes sur les divulgations de secrets d'État, a rapporté mardi le China Daily.

«Les transmissions d'informations devraient être immédiatement arrêtées s'il s'avère qu'elles contiennent des secrets d'État», a de son côté expliqué l'agence officielle Chine Nouvelle, citant un des amendements. En outre, les archives devraient être conservées et la découverte signalée aux autorités, a-t-elle ajouté.

En Chine, la notion de secrets d'État est très large et peut inclure à peu près tout type de données - cartes, coordonnées GPS et même statistiques économiques. Des hauts responsables utilisent parfois cette classification pour éviter de révéler des informations.

Le projet d'amendements conserve cette large définition. Il considère les secrets d'État comme «des informations qui concernent la sécurité et les intérêts de l'Etat, qui en cas de divulgation, nuiraient à la sécurité et aux intérêts de l'État dans les domaines de la politique, de l'économie et de la défense nationale, entre autres», précise Chine Nouvelle. L'agence de presse ne dit pas quelles sanctions en cas d'infraction seraient prévues par les nouvelles règles.

L'adoption du projet ne devrait pas apporter de grands changements, les sociétés de communication étant déjà souvent contraintes de coopérer aux enquêtes. Les nouvelles règles devraient surtout affecter les personnes qui utilisent des fournisseurs locaux de services sur Internet.

De nombreux sites établis à l'étranger, comme Facebook et Twitter, sont déjà bloqués en Chine. La nouvelle loi ne devrait pas non plus affecter les sociétés qui ne fournissent pas de services et ne stockent pas de données en Chine.

En 2006, Yahoo avait été très critiqué par les défenseurs des droits de l'homme pour avoir remis à la justice chinoise des courriels du journaliste chinois Shi Tao. Ce dernier avait été emprisonné en 2005 au motif qu'il aurait livré des secrets d'État à des étrangers. Ses courriels auraient contenu des notes sur un mémo du gouvernement concernant des restrictions imposées aux médias.

Le projet d'amendements a été soumis lundi à la commission permanente du Congrès national du peuple pour un examen en troisième lecture, normalement la dernière étape avant son adoption par les députés.

Les autorités chinoises semblent déterminées à contrôler le flux d'informations accessible à la plus grande population mondiale d'internautes (384 millions d'utilisateurs). Le gouvernement a récemment publié de nouvelles règles pour renforcer les procédures d'enregistrement des noms de domaine et supprimer les sites qui ne sont pas enregistrés officiellement.

Les autorités chinoises considèrent le contrôle de l'information comme essentiel pour éviter la contagion de troubles. Après les émeutes ethniques dans la province du Xinjiang (ouest) en juillet, Pékin avait privé la région d'accès à Internet et ralenti les services de téléphonie mobile.

Les défenseurs des droits de l'homme soulignent que le contrôle de l'information en Chine vise à étouffer toute contestation du pouvoir du Parti communiste, et à identifier et punir les militants politiques.