Les seniors sont de plus en plus nombreux à vouloir améliorer leurs connaissances informatiques, comme certains le font dans les locaux de l'association parisienne Fraternité numérique, qui entend combattre la «fracture numérique» entre générations.

«J'ai souffert avec Vista. Ne doit-on pas attendre trois ou quatre ans pour que Windows 7 soit au point?», demande à ses formateurs Claude Rosales, faussement sérieux devant son écran.La question fait rire l'assistance: ce retraité de 78 ans fait en effet partie d'un groupe de 13 seniors, dont les plus jeunes ont 60 ans, venus améliorer leurs connaissances informatiques dans les locaux de l'association parisienne Fraternité numérique, qui entend combattre la «fracture numérique» entre générations.

«Jusqu'à 76 ans, je n'avais jamais touché internet. Je suis venu ici pour apprendre à communiquer, à faire du traitement de texte», explique Claude qui a découvert «un autre monde» avec Google et se dit «émerveillé de voir le wifi à tous les coins de rue» à Bruxelles, d'où il revient.

Wifi, nouvelles clefs USB, compatibilité entre matériels dernier cri et plus anciens: pendant trois heures, les trois formateurs, âgés de 19, 25 et 63 ans, répondent aux nombreuses questions, assez techniques, d'un groupe qui maîtrise déjà largement les bases de l'informatique.

«Mon ordinateur, c'est le cadeau des collègues pour mon départ en retraite il y a deux ans. C'est une "super-bête", mais là, je ne peux plus appeler la maintenance quand il y a un problème, je suis toute seule. J'ai donc besoin des "piqûres de rappel" que l'on nous fournit ici», témoigne Rolande, 67 ans.

«On prépare des cadres, des thèmes, mais on s'arrange pour que ça reste ouvert à leurs problèmes concrets. Tous sont très à l'écoute et mettent immédiatement en pratique ce qu'on leur montre», explique Clément. Au hit-parade des demandes, des informations sur Picasa, le service d'album photo en ligne de Google.

«Nous avons aussi des cours pour débutants, des gens qui prennent la souris dans leur main le premier jour», raconte Brice Alzon, le jeune président de Fraternité numérique. Son association, créée fin décembre, a déjà formé 650 seniors à l'informatique.

«62% des Français ont un ordinateur dont 20% de seniors, ce qui nous place derrière les pays nordiques», affirme Christine Balagué, présidente de Renaissance numérique, une association qui défend l'internet et le «numérique citoyen».

Elle souligne qu'«outre le formidable enjeu du numérique pour maintenir ou créer un lien social, il permet aux seniors de mieux gérer les problématiques de santé, et notamment de maintien à domicile».

«La lutte contre l'isolement reste l'enjeu majeur», confirme la secrétaire d'État aux Aînés Nora Berra, venue encourager les efforts de Fraternité numérique dans le cadre de la «semaine bleue» de solidarité, et qui a partagé jeudi quelques moments d'un cours d'informatique.

Elle rappelle que les trois-quarts des personnes âgées souhaitent rester chez elles plutôt que d'aller en maison de retraite, et souligne le risque qu'il y a à «laisser les seniors s'isoler par rapport à la numérisation grandissante» de la vie quotidienne.

«Le point de départ de leur demande, c'est toujours pratique: comment communiquer avec le petit-fils ou le neveu parti à l'étranger? Mais les seniors actifs savent aussi qu'ils vont encore vivre longtemps: soit ils se mettent maintenant à l'informatique, soit ils devront être assistés», ajoute Brice Alzon, rappelant que l'internet est aujourd'hui obligatoire pour acheter un billet Prem's de la SNCF.