On croirait à une photo. Dans le catalogue du fabricant Meubles Rive Sud, la chambre à coucher d'enfant a toutes les apparences de la réalité, avec ses objets épars, sa fenêtre ouverte sur le quartier, la couette lancée négligemment sur le lit.

Elle est entièrement virtuelle. Illusions, manipulations, électrons...

C'est l'oeuvre de Pixi Studio, spécialiste des images de synthèse hyperréalistes.

Pour vous montrer leurs produits dans le contexte le plus favorable (et le plus vendeur), les fabricants de meubles et de douches les font habituellement photographier dans des décors fabriqués en studio. Pixi Studio soutient qu'il est plus efficace et rentable de créer des images 3D modifiables à volonté.

Dans une illustration numérique 3D, les objets sont numérisés sur toutes leurs faces et selon les trois dimensions, de telle sorte qu'ils peuvent être manipulés et orientés. C'est ce qui a permis à Pixi Studio de créer les fichiers 3D des figurines moulées des Têtes à claques, dont les vidéos n'utilisent que des images en à-plat, sur lesquelles sont plaquées des bouches animées.

Pixi Studio a été fondé en 2004 par le designer Pierre Savoie. Au tournant des années 2000, alors qu'il sortait à peine de l'école de design industriel de l'Université de Montréal et que le design 3D balbutiait encore, il avait déjà accumulé plus de 10 000 heures de dessins sur ordinateur.

Il a rapidement été invité à se joindre au Studio Design Innovation, que Bombardier était en train de constituer. «J'étais le seul designer industriel spécialisé en conception assistée par ordinateur», raconte-t-il. Son rôle consistait à trouver comment intégrer l'ordinateur au processus de design.

«BRP était le premier à avoir saisi que le 3D serait un outil indissociable du design», observe la designer Annie Maurice, directrice du développement des affaires de Pixi.

BRP est demeuré un des principaux clients de la petite entreprise de six personnes. Le fabricant leur demandera par exemple de traduire en images 3D l'intention esquissée par un concepteur. Pas simple: il s'agit de rendre réalistes, en fonction des contraintes mécaniques véritables, les traits expressionnistes du créateur sans en trahir l'esprit ni en diminuer le caractère.

Plus tard dans la conception, Pixi pourra être appelé à modéliser les différentes possibilités de teintes et de graphisme d'un bateau sport ou d'un VTT.

Le revêtement et les coutures de la sellerie, par exemple, ne sont pas inclus dans les dessins techniques numérisés fournis par le fabricant. Tout l'art consiste à y ajouter couleurs, textures, ombres, reflets. La vie, quoi.

Les animateurs vidéo 3D pourraient faire un travail similaire, convient Pierre Savoie. Mais «leur finalité, c'est l'image», dit-il. Quand ils animent les mouvements des pièces mobiles, la formation technique des designers de Pixi Studios leur fait parfois découvrir des incompatibilités géométriques ou mécaniques, qu'ils signalent bien sûr aux concepteurs.

Leur maîtrise des formes organiques leur a permis aussi de concrétiser en images 3D les courbes complexes des petites voitures tout en rondeurs Tiny'n Tuff de Mega Bloks. «On ne devait faire que du visuel de conception, mais je suis allé tellement proche du produit fini qu'ils m'ont demandé de pousser mes modèles pour aller directement en production», raconte Pierre Savoie.

Quand on lui demande quel a été son plus grand défi, sa réponse surprend: la couette sur le lit de la chambre d'enfant. Le fabricant avait fourni les fichiers numériques des meubles. Mais il fallait faire surgir la couette du néant, un objet mou et informe. «Notre contact était la responsable du pliage de la couette dans les séances de photos. On ne pouvait pas lui en passer.»

Comme l'exprime Annie Maurice, le secret réside dans la reproduction parfaite des imperfections de la réalité.

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