Mettre son ordinateur à la disposition de projets scientifiques, pratique aujourd'hui gratuite, pourrait devenir une source de revenus, selon des chercheurs européens qui ont imaginé comment un tel marché pourrait fonctionner.

Mettre son ordinateur à la disposition de projets scientifiques, pratique aujourd'hui gratuite, pourrait devenir une source de revenus, selon des chercheurs européens qui ont imaginé comment un tel marché pourrait fonctionner.

Depuis quelques années, le recours à la bonne volonté des particuliers pour faire avancer des projets s'est largement répandu grâce au calcul distribué. Contrairement au calcul parallèle, ce nouveau mode de partage des ressources n'utilise pas d'ordinateurs spécialement dédiés, mais des machines dévolues d'abord à d'autres tâches.

Une plate-forme de calcul souvent utilisée pour mobiliser un grand nombre d'ordinateurs connectés à l'internet est le logiciel BOINC (Berkeley Open Infrastructure Network Computing), de l'université de Berkeley aux États-Unis.

Il est par exemple utilisé par GIMPS, dont le but est la découverte de nombres premiers de Mersenne (s'écrivant sous la forme 2 puissance p - 1, p étant premier) toujours plus grands, fonctionne depuis 1996. Le dernier de la liste totalise 9,8 millions de chiffres.

Le projet de loin le plus populaire sous BOINC est SETI@home, qui vise à capter un signal de vie du fin fond de l'univers, et auquel participent près de 800 000 personnes.

Plus récemment, dans le but de mieux comprendre les mécanismes du changement climatique, Climateprediction.net a entrepris de comparer des modèles tous très gourmands en chiffres.

Les ordinateurs mobilisés peuvent fournir soit de la puissance de calcul grâce à leur microprocesseur, soit de la mémoire de disque dur, ou encore les deux.

Pour faire avancer les connaissances médicales, Proteins@home, sous BOINC, coexiste avec Folding@home, de l'université de Stanford, qui a atteint en septembre 2007 une puissance de calcul d'un pétaflop (un million de milliards d'opérations par seconde) grâce à la mobilisation des Playstations 3 de Sony.

Le projet de recherche Catnets, financé par l'Union européenne de 2004 à 2007, est parti du constat que la demande de puissance de calcul était en forte augmentation dans une grande variété de domaines.

«Nous nous sommes demandés ce qu'il adviendrait si tous les participants, et pas seulement les instituts de recherche, avaient une demande de capacités de calcul», a expliqué à l'AFP Torsten Eymann, professeur d'informatique économique à l'université de Bayreuth, en Allemagne, l'un des chercheurs de Catnets.

Il relève notamment que «dans le secteur bancaire ou dans l'industrie automobile, les besoins de calcul sont énormes».

Pour que l'offre et la demande se croisent, deux modèles sont envisageables: le premier repose sur le modèle du site d'enchères en ligne eBay, où une prestation est vendue au plus offrant grâce à une plate-forme centralisée. Le second repose entièrement sur des négociations de gré à gré entre un vendeur et un acheteur intéressés par une capacité de calcul ou du stockage de données.

Les logiciels pour qu'un tel marché existe pourraient voir le jour prochainement et «dans 20 ou 30 ans l'ensemble de l'internet calculera pour l'industrie, la recherche, des particuliers», prédit M. Eymann.

Mais pour l'industrie, développer des innovations sur ordinateurs non sécurisés pourrait s'avérer trop risqué. Selon le chercheur allemand, «cela conduira plutôt à un monde ou existeront quelques grands fournisseurs dignes de confiance comme IBM, Sun Microsystems ou peut-être aussi Google et Microsoft, qui fourniront des prestations à la fois sûres et relativement bon marché à partir de leurs grands centres de calcul».