Les mondes virtuels sur ordinateur, dont le plus populaire d'entre eux, Second Life, suscitent la convoitise des marques qui y voient un nouveau terrain de jeu pour se faire connaître, mais elles jouent la prudence pour ne pas brusquer les joueurs.

Les mondes virtuels sur ordinateur, dont le plus populaire d'entre eux, Second Life, suscitent la convoitise des marques qui y voient un nouveau terrain de jeu pour se faire connaître, mais elles jouent la prudence pour ne pas brusquer les joueurs.

«Le monde numérique est artistique, créatif, mais aussi un monde d'entreprises», a reconnu jeudi Philip Rosedale, PDG de la société californienne Linden Lab et créateur de Second Life, univers virtuel sur internet en perpétuelle expansion, lors du marché des contenus numériques MipTV à Cannes.

Effectuant son exposé via son avatar sur une plage virtuelle de Second Life, devant une audience intriguée, M. Rosedale a expliqué comment la monnaie inventée pour ce monde, le Linden, pouvait être convertie en dollars, générant 500 millions de dollars de transactions par an, essentiellement des ventes, entre utilisateurs, d'objets virtuels (bijoux, habits...).

Avec 5,7 millions de membres dont 200 000 actifs par jour, cette communauté donne des idées aux marques: «des centaines d'annonceurs y sont déjà présents», relève Reuben Steiger, ancien de Linden Lab qui a créé une société, Millions of Us, pour aider des sociétés comme Intel, Coca-Cola ou Toyota à pénétrer ce monde virtuel.

Car il ne suffit pas de s'y montrer pour réussir son marketing: M. Steiger cite l'exemple d'une banque qui a échoué à faire venir ses clients dans son agence virtuelle, simplement parce qu'elle était une copie statique de l'agence réelle.

«Notre travail est de traduire la marque, d'abord en expliquant à l'entreprise que le produit qu'elle fabrique n'a aucune signification dans le monde virtuel», dit-il: «à quoi bon montrer une bouteille d'une boisson connue si on ne peut rien faire avec ?»

Pour réussir virtuellement, une marque «doit donner aux utilisateurs des choses à faire», estime-t-il car ces derniers cherchent surtout à se divertir. Boire cette boisson devra permettre de danser, de crier, etc.

«Avant nous avions un marketing propre et net, maintenant les utilisateurs créent leur propre contenu pour le mélanger à notre marque», car dans ce monde virtuel ce sont les joueurs qui créent les nouveaux contenus, note Jens Monsees, directeur de l'innovation à BMW.

Certaines marques ont trouvé leur chemin: la 20th Century Fox a recréé sur une île virtuelle ses studios où les utilisateurs peuvent tourner des films, le meilleur gagnant un voyage. Warner Music a lancé plusieurs artistes en faisant écouter leur album sur Second Life.

Aux Pays-Bas, les avatars Eccky, qui représentent des adolescents qu'il faut nourrir et distraire, ont noué des partenariats, notamment avec la chaîne de vêtements H&M dont la boutique permet de les habiller, et la marque d'aliments pour animaux Whiskas pour nourrir chat ou chien virtuel.

«Il y a beaucoup de potentiel en publicité, il faut juste que la marque soit appropriée», estime Bas Verhart, PDG de Media Republic Development, créateur d'Eccky.

Sur Second Life, BMW a créé un espace où des représentants de la marque sont constamment disponibles pour répondre aux questions: «il faut que nous soyons toujours en ligne sinon ça ne marche pas», dit M. Monsees, satisfait du résultat: «nous avons pu entrer en contact avec des clients nouveaux et plus jeunes».

«Les annonceurs qui vont sur Second Life ont, en peu de temps, entre 30.000 et 50.000 utilisateurs en contact direct avec leur marque, c'est bien plus que dans le monde réel, mais il faut qu'ils comprennent que c'est un monde en activité, ils ne peuvent pas juste y créer un objet et le laisser là», selon M. Steiger.