Les genoux de Chen Cheng tremblent de manière apparemment incontrôlée: à 17 ans, comme 2,5 millions de Chinois, il est «drogué» à l'Internet, ce qui a poussé ses parents à le placer dans une clinique spécialisée de Pékin.

Les genoux de Chen Cheng tremblent de manière apparemment incontrôlée: à 17 ans, comme 2,5 millions de Chinois, il est «drogué» à l'Internet, ce qui a poussé ses parents à le placer dans une clinique spécialisée de Pékin.

Dans cette banlieue de la capitale chinoise, une vingtaine d'adolescents sont enfermés dans un centre de traitement de la dépendance à l'Internet géré par l'armée.

Chen Cheng pouvait passer trois jours sans dormir ni manger pour assouvir sa passion des jeux en ligne, où il se rêvait Superman.

«Je ne tirais aucune satisfaction de ce que je faisais dans la vie réelle», explique ce jeune à lunettes.

Le centre, situé dans le quartier militaire de Daxing, a ouvert ses portes fin 2004, le premier du genre en Chine. Il a reçu plus de 1500 patients âgés de 14 à 36 ans et revendique un taux de succès de 70%.

La plupart viennent de familles aisées, car le coût du traitement est assez élevé: près de 10 000 yuans (1300 dollars) par mois, soit près d'un an de salaire pour la plupart des Chinois.

«Certains de ses enfants vivent dans un autre monde. Ils assument des rôles de rois ou de magiciens. Pour utiliser une expression occidentale, leur âme est passée de l'autre côté», dit Tao Ran, fondateur et directeur du centre.

L'une des méthodes de la clinique est de les pousser à une rencontre directe avec le monde réel: ils doivent laver leur linge, jouer avec de vrais jouets et peindre avec des pinceaux réels.

Levés à 06H30, ils alternent des séances de sport et de thérapies. Les dix premiers jours sont assez stricts avec interdiction de sortir.

«Certains des patients deviennent fous quand ils réalisent qu'ils ne peuvent pas sortir», dit Guan Peihong, un lycéen de 17 ans originaire du Heilongjiang, dans le nord-est de la Chine. «Ils hurlent et crient qu'ils veulent sortir», témoigne-t-il.

Au bout de dix jours, la surveillance se relâche. Certains en profitent pour s'enfuir, mais une fois rattrapés, ils sont placés dans une pièce avec seulement un lit et un bureau.

«Nous leur donnons un livre où ils doivent coucher leurs pensées. Pourquoi se sont-ils enfuis ? Que veulent-ils faire de leur vie ? Cela prend deux ou trois jours, ce n'est pas la même chose que de les enfermer», affirme M. Tao.

«Ces enfants n'ont cessé de jouer toute la journée, ils n'ont jamais eu l'occasion de penser à leur avenir», note-t-il.

Une pièce à l'intérieur d'un bâtiment triste est réservée aux cas les plus sérieux, avec, au programme, des électrochocs de faible voltage à travers des aiguilles placées sur le corps, selon la technique de l'acupuncture.

«Tout le monde ne doit pas passer par là, mais nous le proposons pour les patients qui ont de gros problèmes de sommeil», explique Wang Yanbin, le médecin qui contrôle l'administration des électrochocs.

Pour M. Tao, il existe 2,5 millions de dépendants à l'Internet en Chine, essentiellement des jeunes garçons attirés par les jeux en ligne, un phénomène qui inquiète les autorités.

«La violence et le sexe dans ces jeux ont une influence profonde sur eux. Et cet impact se produit durant leurs années de formation de leur personnalité», dit-il.

Une trentaine de cliniques pour soigner les problèmes de dépendance à l'Internet existent désormais en Chine, où le gouvernement a interdit toute ouverture supplémentaire de cybercafés en 2007 pour lutter contre le phénomène.

Selon une étude récente citée par l'agence officielle Chine Nouvelle, 33,5% de la délinquance juvénile dans la région de Pékin est liée au temps excessif passé à jouer en ligne.