D'abord adoptée par les technophiles, la baladodiffusion fait tranquillement son chemin auprès du grand public québécois. En trois ans d'existence, la production d'ici est passée de nulle à foisonnante. Seule ombre au tableau, le contenu francophone accuse toujours un retard par rapport à sa contrepartie anglophone.

D'abord adoptée par les technophiles, la baladodiffusion fait tranquillement son chemin auprès du grand public québécois. En trois ans d'existence, la production d'ici est passée de nulle à foisonnante. Seule ombre au tableau, le contenu francophone accuse toujours un retard par rapport à sa contrepartie anglophone.

Avec plus de 200 podcasts indépendants (individus) et 100 podcasts corporatifs (grands médias, institutions, entreprises, etc.), en anglais et en français, la baladodiffusion, un mode de distribution de capsules audio ou vidéo par l'intermédiaire d'Internet, connaît une belle croissance au Québec depuis ses premiers balbutiements en 2004.

«Au départ, c'étaient surtout les technogeeks qui s'intéressaient à ça, rappelle Sylvain Grand'Maison, webmestre du site Le Québec en baladodiffusion (www.quebecbalado.com). En 2004, pas grand monde savait ce que c'était. Trois ans plus tard, tout le monde le sait, mais pas tout le monde écoute.»

Cette méconnaissance persistante du médium par un pan de la population serait attribuable à un manque d'information. Encore aujourd'hui, indique Sylvain Grand'Maison, beaucoup de gens croient qu'il faut un lecteur mp3 ou un iPod pour jouir du plaisir de la baladodiffusion.

«Tout ce que ça prend pourtant, fait-il remarquer, c'est un ordinateur, une connexion Internet, un fureteur (Netscape, Safari, Firefox, etc.) et un agrégateur (iTunes, Juice, etc.) pour écouter en ligne ou télécharger.»

Selon Yann Paquet, premier directeur des nouveaux médias à Radio-Canada, cette façon de consommer demeure toujours l'une des plus populaires. «Ça reste le premier moyen, estime-t-il. Internet, c'est un média mature, ce qui n'est pas le cas de la baladodiffusion».

D'abord la langue

La lenteur du développement du podcasting, surtout en français, s'expliquerait de plusieurs façons. Par la langue d'abord, qui ralentit l'entrée chez nous de toute technologie, mais aussi par le choix que font plusieurs podcasters québécois de s'exprimer en anglais pour rejoindre un plus grand auditoire.

Certains, comme Marie-Chantale Turgeon (Vu d'ici/ Seen From Here) et Laurent LaSalle (Headphones Required/Mets tes écouteurs), deux des plus populaires du moment, ont toutefois opté pour le bilinguisme.

«C'est peut-être parce que le nom - «podcast» - est en anglais, mais aussi parce que Toronto (par rapport au Québec) est vraiment très dynamique en baladodiffusion», avance quant à lui Sylvain Grand'Maison.

Certains animateurs québécois tirent cependant bien leur épingle du jeu. Même s'il demeure pratiquement impossible de tenir un palmarès des plus aimés (chaque podcast est téléchargé de différentes sources ou est écouté en direct), on convient d'emblée que trois émissions de Radio-Canada occupent la tête du peloton francophone. Il s'agit des meilleurs moments des émissions radiophoniques de Christiane Charette, de la Première Chaîne (La Première à la carte) et de Bruno Guglielminetti (Le Carnet techno).

«L'expérience optimale, c'est d'écouter Christiane Charette en direct à la radio, croit néanmoins Yann Paquet. La consommation sur demande est une façon de la rattraper.»

Chez les indépendants, la palme revient à Musironie, la radio poubelle de gauche (www.musironie.com) qui, comme son nom l'indique, traite de musique et d'actualité sans mettre de gants blancs.

Du côté anglophone, les podcasts «corporatifs» de la CBC, notamment celui de George Strombolopoulos (The Hour), se retrouvent également en tête de lice. Chez les indépendants, c'est le pionnier Julien Smith (www.inoveryourhead.net), une véritable rockstar du podcasting, qui continue de mener la course, partageant désormais sa première position avec Sébastien Lefebvre et Patrick Langlois (www.manofthehour.ca).

L'avenir

Affichant une performance exceptionnelle de 200 000 téléchargements par mois, Radio-Canada est loin de s'asseoir sur son succès en baladodiffusion. Même que la société d'État s'applique désormais à développer de nouveaux contenus destinés exclusivement au médium.

«Depuis un an, on a beaucoup de succès avec nos podcasts ponctuels comme celui du Salon du livre de Montréal. On essaie aussi de se concentrer sur de nouvelles expériences comme la vidéobaladodiffusion. (...) La grande leçon qu'on retient, c'est que la baladodiffusion, ce n'est pas seulement une façon de rendre disponibles des émissions de radio. C'est un médium d'accompagnement. C'est un choix qu'on fait», soutient Yann Paquet.

Avant de poursuivre leur exploration de la vidéobaladodiffusion et du Web en streaming, une autre forte tendance, Radio-Canada et la plupart des podcasters canadiens devront toutefois s'attaquer à l'obstacle majeur que sont les droits de diffusion des fichiers musicaux ou vidéo.

«Le plus gros irritant en ce moment, c'est la portion vidéo. C'est probablement là où on a le plus grand retard à rattraper. Le jour où on va régler le problème, ça va nous permettre de progresser beaucoup plus rapidement. Le danger, c'est qu'entre-temps, les Québécois aillent chercher le contenu visuel ailleurs. Comment se repositionner une fois que l'espace sera occupé?» demande Yann Paquet.

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