L'Américain Richard Stallman, instigateur du combat pour les logiciels libres, a défendu à La Havane sa doctrine, condamné l'embargo américain contre Cuba mais déclaré qu'il ne «soutenait pas» les restrictions d'accès à Internet dans l'île communiste.

L'Américain Richard Stallman, instigateur du combat pour les logiciels libres, a défendu à La Havane sa doctrine, condamné l'embargo américain contre Cuba mais déclaré qu'il ne «soutenait pas» les restrictions d'accès à Internet dans l'île communiste.

«Ca ne me plaît pas (le contrôle d'accès à Internet), je ne dis pas que je soutiens les politiques de l'Etat cubain», a-t-il déclaré à l'AFP après une conférence donnée mercredi soir à l'Université de La Havane contre la «tyrannie» des logiciels commerciaux.

Invité de la conférence internationale Informatique 2007, le «pape du logiciel libre» a fustigé le gouvernement du président américain George W. Bush, qualifié de «plus grand violeur des libertés», ainsi que Microsoft, le géant de l'informatique.

L'embargo américain contre Cuba, en vigueur depuis 1962, «me paraît injuste», a-t-il déclaré devant un auditoire d'étudiants cubains en cybernétique, informatique ou mathématiques.

Cuba, qui réglemente sévèrement l'accès des particuliers à Internet ainsi que la possession d'ordinateurs, argumente que l'embargo américain en est responsable en bloquant son accès aux câbles de fibre optique sous-marins, l'obligeant à des connexions satellitaires de 65 Mbps de sortie et de 124 Mbps d'entrée.

Le réseau cubain est ainsi semblable à un vaste «Intranet» destiné à un «usage social» qui priorise les secteurs de la santé, de l'éducation, les centres scientifiques et les institutions au détriment des particuliers.

Barbe imposante, tenue décontractée, l'excentrique avocat des logiciels libres, ancien du Massachusetts Institute of Technology (MIT) et diplômé d'Harvard, s'est adressé à son auditoire dans un bon espagnol en maniant l'humour pour défendre sa théorie des «cinq libertés» pour une «vraie démocratie informatique», dont celles de la libre exécution des programmes, de l'accès à leurs codes-source ou de la libre distribution des copies de logiciels.

«Dans le monde de l'informatique, la liberté, ce n'est pas de choisir entre plusieurs programmes privés, c'est de ne pas avoir de maîtres, de ne pas utiliser de logiciels privés», une industrie selon lui «ni éthique, ni solidaire», a-t-il dit.

À l'ouverture lundi de Informatique 2007, le ministre de la branche et ancien fondateur des services secrets cubains, Ramiro Valdes, avait cité Bill Gates, patron de Microsoft, qui, selon lui, venait d'affirmer que «les partisans des logiciels libres sont les communistes modernes».

Richard Stallman, qui a créé la Fondation pour les logiciels libres (FSF, en anglais) en 1985, avant de collaborer avec Linus Torvalds, créateur de Linux, s'est toutefois montré réservé sur l'avenir du logiciel libre: «Je ne sais pas, je ne lis pas l'avenir, ma boule de cristal a de la buée», a-t-il répondu aux étudiants, tout en leur demandant de se consacrer à l'étude et à l'enseignement du logiciel libre.

L'un des professeurs d'informatique présents, Julio Vidal, a indiqué à l'AFP que «la politique du pays est d'aller vers les logiciels libres» et «l'Université de La Havane a été la première (institution du pays) à miser sur eux».

«Il y a un processus qui doit se développer progressivement, à mesure de celui des logiciels libres, beaucoup d'applications doivent encore être développées», a-t-il ajouté.

Déguisée en «Saint Ignucio» (mélange de Saint Ignace et de son code informatique GNU, licence publique générale), revêtu d'une soutane noire avec pour auréole un CD, Richard Stallman a terminé sa conférence en «bénissant les ordinateurs cubains pour qu'ils migrent vers les logiciels libres».

«Dans notre église, le seul péché est le recours aux logiciels privés», a-t-il conclu sous les rires de l'assistance.