Il y a une semaine, Adnan Hajj était un photographe peu connu. Il est maintenant le sujet de multiples discussions sur les blogues.

Il y a une semaine, Adnan Hajj était un photographe peu connu. Il est maintenant le sujet de multiples discussions sur les blogues.

Le photographe pigiste, qui fournissait ses photos du Liban à Reuters, a été renvoyé par l'agence de presse pour avoir manipulé deux photos, dont une sur laquelle il a accenté la noirceur de la fumée qui s'élevait d'immeubles bombardés.

C'est un blogueur qui a révélé la manipulation. Mais il a, en même temps, attisé les discussions sur les photos dans les médias.

«Fauxtography», titre un blogueur, en soupçonnant le New York Times d'avoir publié de multiples photos truquées de la guerre au Liban. Plusieurs autres blogueurs accusent Reuters d'avoir été à la solde du Hezbollah.

Le directeur photo de La Presse, Alain-Pierre Hovasse, rappelle que les photographes sont guidés par une éthique professionnelle qui interdit de manipuler les photos comme l'a fait Adnan Hajj.

«Photoshop est utilisé sans arrêt, dit-il. On s'en sert pour faire des ajustements comme des recadrages, ou ajuster la tonalité. Mais on ne touche pas à la photo. On est là comme des journalistes, pas comme des truqueurs...»

Une opinion partagée par Gérard Julien, rédacteur en chef photo de l'AFP pour la France.

«Faire d'une photo d'été une photo d'hiver est absolument interdit, comme retirer un micro ou un arrière-plan disgracieux», a-t-il déclaré à l'AFP.

Alain-Pierre Hovasse se réjouit que la photo truquée de Reuters fasse parler.

«C'est un incident malheureux, mais on prend ça très au sérieux. Tout le monde en parle, les photographes ne le cachent pas quand des choses du genre arrivent.»

Il souhaite que cette histoire vienne déboulonner des mythes sur le travail que lui et ses collègues font.

«Les gens se font un tas d'idées sur ce que font les photographes», dit-il.

Il déplore que pour beaucoup de gens, la seule mention du logiciel Photoshop évoque le trucage d'une photo.

«C'est un outil important pour les photographes, dit-il. Mais ceux qui connaissent le logiciel savent que ça prend du temps faire des trucages. À La Presse, nous avons de très bons photographes, ils n'ont pas besoin de faire ce travail-là. Et tout le monde connaît bien les règles.»

Depuis que la photo truquée a été diffusée, Reuters a revu sa procédure. Dorénavant, toutes les photos provenant du Proche-Orient sont révisées par des rédacteurs en chef.

«Samedi, nous avons publié 2000 photos, a dit un responsable de Reuters au New York Times. Elles ont été manipulées lors d'une journée occupée, par quelqu'un avec moins d'expérience que nous le souhaiterions dans des conditions idéales.»

Le photographe, Adnan Hajj, soutient maintenant qu'il a simplement voulu enlever de la poussière sur les photos et arranger la lumière.

Pour Alain-Pierre Hovasse, cette explication ne tient pas la route.

«C'est un gros mensonge, croit-il. On se demande ce qu'il lui a pris. Pourquoi a-t-il commis un suicide professionnel? Ce n'était pas un mauvais photographe…»

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