Pour la première fois de l'histoire, le sans-fil déclasse le bon vieux téléphone pour se hisser au premier rang du marché des télécommunications au pays, révèle un rapport du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

Pour la première fois de l'histoire, le sans-fil déclasse le bon vieux téléphone pour se hisser au premier rang du marché des télécommunications au pays, révèle un rapport du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

Le marché du sans-fil - le téléphone portable, mais aussi la messagerie texte, l'accès Internet sans fil et les services de téléappel - a généré des revenus de 11 milliards l'an denier au Canada, soit un bond de 16,2 % par rapport à 2004.

Résultat: il se brasse désormais plus d'argent dans ce marché que dans celui des appels locaux par téléphone fixe, traditionnellement le secteur le plus important des télécommunications canadiennes.

Le CRTC, qui dresse un portrait complet du monde des télécoms au pays dans son rapport, se souviendra aussi de l'année 2005 comme celle où les câblodistributeurs comme Vidéotron ont pris d'assaut le marché de la téléphonie locale, ébranlant encore davantage les anciens monopoles comme Bell.

Les nouveaux concurrents ont plus que doublé la part des lignes téléphoniques résidentielles qu'ils détiennent, passant de 3,3 % en 2004 à 7,6 % en 2005.

«Ce n'est que le début, croit Brian Sharwood, analyste en télécommunications au SeaBoard Group. La croissance s'accélère. Je ne serais pas surpris que ce chiffre (7,6 % des lignes détenues par les nouveaux acteurs en 2005) soit déjà passé à 12 %», a-t-il dit hier à La Presse Affaires.

Les entreprises comme Vidéotron ou Cogeco connectent leurs clients au réseau public de téléphone grâce au protocole Internet, une nouvelle technologie que le CRTC a approuvée l'an dernier.

Quant au triomphe du téléphone cellulaire, il ne surprend pas l'analyste Brian Sharwood.

«Déjà, en 2004, les Canadiens avaient parlé plus de minutes sur des téléphones portables que sur des téléphones fixes», souligne-t-il.

Ce n'était donc qu'une question de temps avant que le sans-fil devienne le premier générateur de revenus des télécommunications.

Le rapport du CRTC explique que les avancées technologiques ont profité à l'industrie du sans-fil.

Photos, messages textes, clips audio et vidéo: on peut aujourd'hui tout transmettre avec un cellulaire, faisait paraître les possibilités du bon vieux téléphone bien réduites.

Le nombre d'abonnés au service sans fil est d'ailleurs en constante progression au pays (58,9 abonnés par tranche de 100 ménages en 2005, comparativement à 41,8 en 2001), alors que les lignes fixes perdent en popularité.

En 2005, 4,8 abonnés par tranche de 100 ménages avaient carrément abandonné leur téléphone fixe pour compter uniquement sur leur portable, un bond de 78 %.

Les forces s'équilibrent

«Le secteur des télécommunications évolue rapidement, alors que nous nous appuyons de plus en plus sur les forces du marché», a déclaré le président du CRTC, Charles Dalfen, à la lumière des résultats.

Neuf ans après avoir ouvert la porte à la concurrence, le CRTC constate en effet que les anciens monopoles ont perdu des plumes.

Dans l'interurbain, par exemple, les nouveaux acteurs récoltent maintenant 28 % des revenus du marché résidentiel et 44 % de celui des entreprises.

Les consommateurs sortent gagnants de cette concurrence qui fait chuter les prix: alors que le nombre de minutes d'interurbains a bondi de 10,1 % au pays entre 2004 et 2005, les revenus des compagnies, eux, ont chuté de 8,6 %.

Les chiffres rendus publics hier sur le rééquilibre des forces relancent la question de la réglementation imposée par le CRTC aux anciens monopoles.

Dans les secteurs de la téléphonie locale, des entreprises comme Bell ou Telus, par exemple, ne peuvent toujours pas changer leurs prix ou leurs services sans soumettre leurs demandes au CRTC.

«Les gens qui sont réglementés sont ceux qui ont tellement de parts de marché qu'on croit que le libre marché ne peut pas garantir de bonnes conditions (aux clients)», a expliqué le porte-parole Denis Carmel.

Mais les choses changent. À Halifax, les concurrents se sont emparés de 35 % du marché de la téléphonie résidentielle, et le CRTC s'apprête à y lever ses règles.

Le ministre fédéral de l'Industrie, Maxime Bernier, a déjà fait savoir son penchant pour le «libre jeu du marché».

Compte tenu de cette pression politique et des chiffres dévoilés, l'analyste Brian Sharwood prévoit une déréglementation complète de l'industrie d'ici un an.